Park : les secrets du tournage

Sofia Exarchou voulait représenter un groupe d’adolescents vivant dans un lieu abandonné, qui ne leur donne aucune échappatoire et aucun espoir pour l’avenir. La réalisatrice a commencé à chercher cet endroit dans les environs d’Athènes et c’est à ce moment-là qu'elle a découvert l’histoire du village olympique, qui a été construit uniquement pour les besoins des Jeux Olympiques, sans aucun aménagement urbain, avec des maisons toutes identiques entourées d’une clôture. Elle confie :

"Il est complètement isolé, en bordure d’un axe routier, loin de tout véritable quartier.Cet endroit semble abstrait, comme s’il pouvait exister à n’importe quelle époque, n’im-porte où dans le monde. Mais en même temps, il a une forte signification symbolique pour la Grèce. Les Jeux olympiques de 2004 ont apporté beaucoup d’espoir à l’en-semble du pays, mais ont finalement marqué son effondrement. Maintenant, il existe en tant que no man’s land non pas à cause d’une guerre ou quelque chose comme ça, mais en tant que no man’s land créé par les J.O. et je trouve fascinant d’en parler."

Sofia Exarchou a choisi des acteurs amateurs. La cinéaste a ainsi effectué un énorme premier casting qui a duré plus de six mois et a auditionné plus de 500 enfants. Elle a également fait un casting de rue. "Dans la phase finale, nous avons commencé à faire des auditions de groupe. Nous nous sommes concentrés sur des jeux d’improvisation afin de créer un groupe de garçons qui s’adapteraient ensemble et seraient capables de communiquer et d’entrer en relation les uns avec les autres. Nous avons essayé de créer un groupe dynamique qui serait rempli de différents personnages. Au début des répétitions, j’ai beaucoup improvisé avec les adolescents afin de déterminer quels traits des personnages existaient déjà chez eux. Je voulais savoir qui était le plus agressif, le plus drôle, le plus fort et qui allait devenir le leader. Le scénario a créé les personnages mais je voulais voir les vrais adolescents à l’intérieur des personnages, j’ai essayé de les laisser être eux-mêmes dans cet environnement."

Sofia Exarchou voulait que le spectateur ressente le mode de vie de ces jeunes. Quand elle acommencé à écrire le scénario, elle savait qu'elle ne souhaitait pas d’une narration trop poussée où les adolescents sont portés par un grand élan. Elle se rappelle : "Je l’ai fait parce que je voulais être honnête sur leur réalité, sur le fait que quand on vit dans un endroit comme celui-ci, il est très rare d’avoir de grands rêves. Je ne voulais pas construire une narration classique où le personnage rêve de faire quelque chose de sa vie ; son seul rêve est de s’échapper de cet endroit. Je voulais que le public essaie d’habiter ce lieu psychologique à chaque moment du film, soit en gardant la caméra bien en vue sur les adolescents, soit par la façon dont ils se déplacent dans le cadre. Tout cela a été fait dans l’espoir que le spectateur quitte le cinéma avec une petite idée de ce que c’est que de vivre dans un en-droit comme celui-ci, et quand je dis un endroit comme celui-ci, je veux dire n’importe quel endroit avec les mêmes problèmes."

Sofia Exarchou est née à Athènes, où elle a validé un diplôme d’ingénieur électronique et un diplôme d’études en cinéma. Elle a étudié le théâtre au Stella Adler Studio de New York et poursuivi des études supérieures en cinéma à Toulouse. Elle a été assistante réalisatrice sur des longs métrages et des publicités depuis 2004. Elle a écrit et réalisé deux courts métrages, Distance et Mesecina, le second ayant été nommé au Los Angeles Greek Film Festival. En 2014, elle a participé au Sundance Screenwriters & Director’s Lab. Park est son premier long métrage, ayant remporté plusieurs bourses internationales d’aide au développement de film (le Prix Works in Progress Award, Karlovy Vary Film Festival / Eurimages development Award, L’aide au développement d’œuvres cinématographiques du CNC, les aides des festivals de films Crossroads-Thessaloniki et Cine-link-Sarajevo).