Si les cinéphiles pointus peuvent citer Kamen Kalev ("Eastern Plays" résenté à la Quinzaine des Réalisateurs en 2009), on ne peut pas dire que l'on soit envahi par des films en provenance de Bulgarie. Raison de plus pour s'intéresser à "Glory", deuxième long métrage du duo Kristina Grozeva et Petar Valchanov. En fait, il y a 2 ans, ces deux réalisateurs avaient commencé, avec "The Lesson", une trilogie s'inspirant de faits divers relatés dans la presse, sur lesquels ils brodent en ajoutant des événements imaginaires.
L'histoire qui a inspiré "Glory" s'est déroulée en 2001 : celle d'un cantonnier qui trouve un tas de billets sur les rails et les remet à la police. Pour le récompenser, l'administration lui avait fait cadeau d'une montre qui s'est arrêtée de fonctionner au bout de quelques jours. Dans une interview donnée plusieurs années après, le cantonnier avait déclaré que s’il trouvait à nouveau un tas de billets par terre, il se contenterait de passer son chemin.
Ce que raconte le film n'est pas fondamentalement différent, mis à part, peut-être, le fait que Tsanko, le cantonier, est bègue et que Julia, la responsable des relations publiques du ministère des transports, a enlevé la montre du poignet du cantonnier au début de la cérémonie au cours de laquelle le ministre doit décorer le cantonnier et lui donner la nouvelle montre, celle qui, très vite, ne va plus fonctionner. Cette montre qu'on a enlevé à Tsanko, non seulement elle fonctionne à la perfection mais, en plus, c'est un souvenir lui venant de son père et il y tient beaucoup. La récupérer va s'avérer plus difficile que prévu ! Quant à Julia, toujours pendu à son téléphone portable, elle trouve difficilement le temps de s'occuper de tout ce qu'elle doit faire dans le cadre de la congélation embryonnaire qu'elle a entreprise.
Se rapprochant beaucoup de certains films roumains (en particulier le récent "Baccalauréat" de Cristian Mungiu), ce très acerbe "Glory" montre une Bulgarie corrompue jusqu'à la moelle, un pays qui a gardé le pire de son passé de pays satellite de l'URSS et y a ajouté les travers du libéralisme, un pays dans lequel un journaliste d'opposition n'a pas beaucoup plus d'états d'âme que la cauchemardesque responsable des relations publiques. Sujet plus universel, on ne peut que souscrire à la charge contre la dictature des téléphones portables montrée dans "Glory".
On notera que Margita Gosheva et Stefan Denolyubov, les acteurs qui interprètent les rôles de Julia et deTsanko, tenaient déjà les rôles principaux dans "The lesson".