Pour Gaspard va au mariage, Antony Cordier s'est inspiré d'un livre de son enfance contant la vie de Claude Caillé, créateur du zoo de la Palmyre, qui a en en partie inspiré le personnage de Max, le père. Le metteur en scène raconte : "C’était un autodidacte d’origine modeste qui partait en Afrique capturer des animaux et les ramenait en France pour les montrer dans les écoles. Il a ensuite créé deux zoos : l’un est devenu le plus grand d’Europe et l’autre a périclité. C’était une personnalité locale flamboyante. Je me souviens de lui qui accueillait les visiteurs de son zoo avec des anecdotes extraordinaires : « Tiens, je vais vous raconter la fois où j’ai fait 200 km avec un gorille sur le siège passager... ». C’était vraiment le zoo comme réservoir à fiction, le zoo comme machine à fabriquer des images surréalistes ! (...) Mais plutôt que de m’intéresser à la success story du plus grand zoo d’Europe, j’ai essayé d’imaginer l’histoire du zoo qui a périclité. Parce qu’on a tous l’impression de vivre la fin de quelque chose, non ? Comme Max."
Antony Cordier a tourné, en compagnie de son équipe, pendant six semaines dans le parc animalier du Reynou, dans le Limousin. Il s'agit d'un zoo à la structure modeste dans lequel une vingtaine de personnes travaille. "L’avantage, c’est qu’on pouvait se planter dans le zoo et regarder comment ils faisaient - le zoo n’a pas fermé pendant le tournage. On avait la matière documentaire sous les yeux. Quand Guillaume Gouix, au détour d’une scène, ramasse un papier et le met machinalement dans sa poche en ronchonnant, c’est parce qu’on a vu le personnel du zoo le faire, ce genre de tout petit détail ne vient pas à l’écriture", se rappelle le cinéaste.
Gaspard va au mariage est divisé en quatre parties. Il s'agit selon Antony Cordier d'un reste de l’architecture du scénario. Il explique : "Normalement ces choses-là disparaissent au tournage mais là il y avait la possibilité de faire des plans différents, filmer les personnages au ralenti et les « épingler » comme des papillons. On retrouvait alors l’idée du livre d’enfants, avec le personnage mis en avant en tête de chapitre dans une posture qu’un enfant pourrait avoir envie de dessiner. Chaque chapitre donne le projet d’un personnage à un moment précis : « Elle doit se faire passer pour la petite amie », « Il doit devenir l’homme d’une seule femme »."
Après le triolisme dans Douches froides, l’échangisme dans Happy Few, Antony Cordier s'attaque avec Gaspard va au mariage à cette relation symboliquement incestueuse. "J’aime bien les choses scabreuses, c’est vrai, mais surtout j’aime bien qu’on n’en fasse pas tout un plat. C’est ce que dit le personnage de Marina Foïs : « Ça va pas menacer l’espèce ». Je voulais simplement évoquer la façon dont l’éducation sensuelle se fait au sein de la famille, dans une forme de promiscuité embarrassante dont il faut savoir se dégager à un moment", précise le metteur en scène.
La maison de Gaspard va au mariage est réellement au coeur du zoo dans le parc du Reynou. Aux yeux de Antony Cordier, elle était intéressante pour le film du fait de son côté insituable en termes d’architecture. C’est un porcelainier américain qui l’a transformée au 19ème siècle, puis elle a appartenu à des Japonais. "Quand on la regarde, on n’est ni France ni aux Etats- Unis, donc c’est déjà un territoire de fiction. C’est une demeure qui cristallise l’atmosphère réaliste et magique du film", note le réalisateur.
Marina Foïs et Elodie Bouchez, que Antony Cordier avait déjà dirigées dans Happy Few, sont présentes au casting de Gaspard va au mariage. Le cinéaste explique : "C’est simplement le plaisir que j’ai de les filmer, de les regarder, toutes les deux. On se dit toujours que le plaisir que l’on a de filmer quelqu’un va se communiquer au spectateur. Et puis c’est comme un gag maintenant : elles partagent toujours dans mes films le même amoureux ! Marina, au-delà de sa nature anticonformiste qui m’est très utile à l’écriture puisque cela rend tout possible, j’adore la regarder faire des choses simples, ramasser un bout de bois, fermer une fenêtre. On voit qu’elle peut s’oublier dans un plan. Quant à Elodie, je peux la filmer tous les jours, elle est comme un ange de celluloïd. Ce sont deux actrices aventureuses."
On retrouve dans Gaspard va au mariage le goût de Antony Cordier pour les intermèdes musicaux. Le metteur en scène voit ces derniers comme renvoyant à l’univers du conte. Il confie : "Les scènes musicales font bifurquer le film, comme Laura qui bifurque au début. Quand Laura et Gaspard dansent le slow par exemple, le décor disparaît totalement, on décroche vers un espace mental. Et dans le dernier quart d’heure du film, il n’y a quasiment pas de dialogue. C’est juste les musiques et la lecture de la lettre de Gaspard, c’est tout."
Les inventions de Gaspard s’inspirent de l’art japonais du Chindogu, qui consiste à inventer des gadgets "utiles mais inutilisables". Ces inventions sont conçues pour améliorer la vie quotidienne mais, dans les faits, n’en font rien, d’où leur caractère paradoxal et drolatique. Les Chindogu répondent à plusieurs principes : ils doivent être compris par tout le monde ; ils ne sont pas faits pour être commercialisés et ne peuvent pas être brevetés ; ils n’ont aucune dimension critique ; ils ajoutent une qualité anarchique à nos soucis les plus courants. A l’arrivée, si un Chindogu se révèle être extrêmement utile, si l’inventeur l’utilise en permanence... alors ce n’est pas un Chindogu !