Dans une ville constituée à 90% de néons, une jeune et jolie pickpocket, Julia (Maika Monroe), se fait enlever par un scientifique, Alex (Ed Skrein), qui la retient captive pour nourrir d'algorithmes basés sur les émotions et les souvenirs son prototype d'intelligence artificielle, TAU, censée être la plus puissante du monde.
Aïe, "TAU" vient s'ajouter à la désormais bien trop longue liste des productions SF oubliables de Netflix ("Annihilation" reste de plus en plus l'exception qui confirme la règle). Comme d'habitude, le film est loin d'être dénué de points positifs : la réalisation (dans la limite de ses moyens) et l'interprétation font bien le job, les inventions robotiques sont plutôt chouettes (le système de nettoyage le plus cool du monde !), "TAU" contient même quelques séquences qui valent le coup d'oeil et la dynamique de la relation se développant entre l'héroïne, l'I.A. sensible et son bourreau de créateur a bien évidemment de quoi susciter l'intérêt de tous les amateurs de SF malgré son manque cruel d'originalité. Bref, on ne s'ennuie pour ainsi dire pas beaucoup devant "TAU" car le film parvient toujours à être un minimum divertissant, au moins à la manière d'un épisode de "Black Mirror" très anecdotique.
Seulement, comme bon nombre de films de la plateforme, on dirait qu'il ne cherche à être rien de plus, comme si le simple fait de cocher la case "ça se regarde vite fait" était son unique ambition. On se retrouve donc avec un nouveau long-métrage mineur, interchangeable, déjà oublié après avoir été consommé et qui semble avoir été écrit dans la précipitation. Encore plus que certains de ses confrères d'ailleurs, "TAU" fait très fort sur ce dernier point, on en vient même à se demander si quelqu'un a bien relu le scénario avant de partir en tournage ! Apparemment écrit par une véritable intelligence artificielle, le film enfile les énormités comme des perles sur un collier qui aurait tous les noms du monde sauf celui de "crédibilité".
Alex a beau nous être présenté comme un des hommes les plus brillants de la planète, on reste assez perplexe sur le fait qu'après avoir enlevé et torturé à coups de décharges électriques d'innocents cobayes, il réalise subitement que leur faire résoudre de simples casse-têtes fonctionne aussi bien pour récupérer des données, il fallait peut-être y penser avant : payer des gens tenus au secret et en leur en cachant la finalité meurtrière pour effectuer ces tests aurait été une idée sans doute moins risquée ou compliquée que le kidnapping...
De même, on a beaucoup de mal à croire que "TAU", intelligence artificielle d'intérieur la plus poussée de la planète pour servir les hommes, peut se passer d'une réelle base de données sur le monde extérieur afin de satisfaire leurs demandes (surtout en étant conçue sur des algorithmes provenant d'émotions et de souvenirs humains bien réels, un autre souci) jusqu'à la faire se comporter comme un nouveau-né rempli de questions à la moindre occasion. Alors, certes, sa conception n'est pas achevée mais on imagine que le reste du travail à effectuer va plutôt se traduire en années qu'en journées comptabilisées par TAU comme un compte à rebours.
Une des plus grandes rigolades viendra aussi du nom de "Sujet 3" donné à Julia, il collera dans un premier temps avec les deux premiers captifs déjà là avant elle mais on apprendra en cours de route un élément essentiel rendant cette dénomination complètement caduque et, de fait, stupide.
Bref, on pourrait continuer un bon moment à énumérer les aberrations relevées devant "TAU" vu que personne ne paraît s'être embarrassé d'énormes efforts pour rendre tout ça véritablement cohérent.
Au final, on se retrouve devant une énième variation de la créature bien plus humaine que son créateur (et qui causera à un moment ou à un autre la perte de ce dernier) dans un nouvel emballage pas assez travaillé pour nous convaincre d'un réel intérêt à aborder cette thématique encore une fois.
Pas assez mauvais pour être réellement désagréable, pas assez bon pour être mémorable, "TAU" n'est juste qu'un produit filmique de plus, bon à se perdre au milieu de tous ses semblables dans le catalogue Netflix. Même la voix de Gary Oldman n'aura pas réussi à donner suffisamment d'intelligence à cette I.A., c'est dire...