Un Depardon superficiel, nombriliste et peu inspiré. Le film commence par une présentation croisée qui ressemble à du lustrage réciproque de membres et fini en posant une question du même ton : comment ces deux références ont ils pu se manquer jusqu'alors ? Visages Villages propose de réparer cette injustice. Agnès Varda et JR, un rebelle en Stan Smith qui ne met pas sa ceinture lorsqu'il conduit (les règles c'est bon pour les prolos qu'il photographie) traversent la France et ses villages. Le procédé est toujours le même 1H30 durant : réaliser des portraits géants des "petites gens". C'est bien sûr un objectif louable mais le rendu m'a semblé répétitif et pauvre artistiquement. Je l'ai même trouvé démagogique lors du "repeuplement" d'un village pour un jour. On ne ressent rien car on ne sait rien, pourquoi ce village est déserté ? Quel est son histoire ? On fait un pique nique, des photos, des interviews qui ne disent rien. On ne saura rien de plus de ces gens que leur portrait. Quel intérêt ? Le lendemain le village sera de nouveau désert et nos artistes de retour dans le 14e, avec leurs stagiaires dont le générique révèle les origines... Même à Neuilly on ne voit pas une telle concentration de particules. Je ne comprend pas que ce film ait pu ravir au-delà du cercle restreint des critiques Télérama et bobos parisiens qui s'offrent depuis leur canapé un roadtrip en France profonde mais... en restant à distance. Là où certains ont vu de l'humanité, de la bienveillance j'ai vu du vide, du gnangnan. On reste toujours à la surface : des vies et de la démarche. Quel est le sens d'une pose, du choix d'une photo plus qu'une autre, du support ? On n'en sait rien, on n'explique pas. Même à la jeune femme qui livre son malaise d'être affichée sur 15mètres de haut, pas de réponse des artistes qui ne comprennent pas que quelqu'un n'ai pas envie de se montrer. Du coup les artistes résoudront le problème en arrêtant de faire semblant de s’intéresser aux autres pour se focaliser sur les seuls qui semblent vraiment les passionner : eux-mêmes. La séquence suivante nous propose de faire rentrer la caméra dans l'usine mais ici encore nos deux artistes ne sont que de passage : on ne verra rien du travail de ces gens, de leur vie, leur réalité. Sans surprise la photo qui en découle sonne comme une séance de team building où l'on loue "l'idée d'être en groupe, de mélanger les services, y compris la Direction...". Quelle audace artistique ! Idem pour la séance "sociale" qui suit : 50 secondes chrono en gros plan pour l'homme qui s'avance vers la falaise de sa retraite. Les dialogues sont d'une pauvreté affligeante et les échanges avec les gens sans aucune profondeur, on préfère nous montrer une partie de ping pong, des gros plans de poissons à la criée et la reconstitution d'une vieille photo de Varda dans laquelle JR vient opportunément s'incruster. Les séances sont ponctuées de transitions dialoguées sur-écrites qui sonnent aussi naturel qu'une chèvre écornée et surtout là encore : creuses. Et puis il y a le problème de la découverte de l'intimité de gens que l'on connaissait ici seulement par leur travail et leur réputation. Et c'est assez terrible, car si l'on entend chez Agnès quelques phrases particulièrement touchantes "je vois que ce sont des femmes oiseaux", chez JR c'est le désert. Ce qui ne nous empêche pas de le voir sauter d'un container à un autre sous les regards admiratifs d'une dizaine de paparazzi en iphones. Quel intérêt ? Quel message ? Je cherche encore. Le film se conclue par la non visite à Godard qui parvient à être abject sans même paraître à l'écran, ce qui n'empêche pas Varda de pardonner quasi instantanément au génie. Au final je crois que je ne garderai de Visage Villages que le beau moment du sonnage des cloches.