Dans « Bright », l'intrigue va mettre du temps à se mettre en place (là où une intrigue doit être posée en 15 minutes, le film met une bonne demie-heure à poser ses enjeux). Et le pire, c'est que la raison de tout ce cirque ne sera jamais complètement expliquée. Et je ne parle pas de petits détails, non, je parle de vraies raisons. On ne comprend rien à qui est vraiment Tikka, que faisait-elle dans cette maison, pourquoi la fée maléfique campée par Noomi Rapace a laissé sa baguette dans les mains de la tueuse. Bref, le flou total. Par contre, on a droit à des enfilades de dialogues sans grande importance (sauf parfois, une réplique ou deux qui éclaire(nt) le sens de la scène), des scènes d'action moches, des personnages aux motivations binaires, des incohérences incroyables (le flair des Orcs, pas toujours au point) et surtout, cette sale manie moderne de tout mettre au niveau de la race et de la communauté.La base de départ appelait sans doute à un tel traitement (quoique...) mais là, ça en devient presque horripilant. Écartelé par une société dans laquelle le débat racial prend une place importante, Hollywood y répond comme il peut (avec une bien-pensance presque condescendante), et on se retrouve avec une fable grossière, qui montre les méchants elfes blancs dominant le monde, avec des flics noirs ou latinos, des gangs latinos, des Orcs, qui composent le sous-monde. Et si on parlait vraiment de race, on pourrait même s'étonner du manque flagrant de personnages caucasiens et mâles positifs dans le film, mais comme on est poli, on ne le fera pas (au fait, le bon compte est 0). Etonnant quand on sait que David Ayer et Max Landis sont de bons gros WASP.Mais revenons au film, avec donc ce brave David Ayer qui avait plus ou moins réussi à être pardonné du naufrage « Suicide Squad », largement plus imputable à des décisions de producteurs sur lesquelles il n'avait pas prise (montage du film en parallèle par deux boîtes différentes, délai de 6 semaines pour écrire le film avant le tournage, casting imposé), mais il n'a jamais renié le film, surtout parce qu'il avait réalisé un excellent score au box-office, et qu'il vaut mieux avoir une part de responsabilité dans un film raté mais qui cartonne que dans un chef d'oeuvre qui s'est vautré. Reste que le présent film est un ratage artistique parfois assez embarrassant. Scénario en carton, étiré sur presque deux heures pour raconter walou (mais qui introduit un duo appelé à revenir), des scènes d'action éclairées aux néons moches, montage brouillon, univers mal dégrossi (plein de pistes de partout, rien d'exploité à fond) et incohérent dans sa logique (les pouvoirs des elfes fluctuant selon les adversaires, pareil pour les Orcs, dont on ne sait rien au niveau des capacités), bref, un film extrêmement moyen, qui s'intègre toutefois parfaitement dans la logique actuelle des blockbusters.