Guillaume Canet s'entoure une nouvelle fois de sa famille de cinéma pour Rock'n Roll, son cinquième film en tant que réalisateur. Alain Attal toujours à la production, l'acteur Philippe Lefebvre (avec qui il a co-écrit Mon Idole et Ne le dis à personne) de nouveau au scénario et devant la caméra, et bien entendu, sa compagne Marion Cotillard et ses amis Gilles Lellouche et Maxim Nucci, qui incarnent ses personnages principaux.
Selon Marion Cotillard dans une interview accordée à AlloCiné, Xavier Dolan aurait lui-même participé à l'adaptation de dialogues en québécois pour une scène de Rock'n Roll. L'actrice confie avoir beaucoup travaillé sur son accent et sur le texte de cette scène. Guillaume Canet confie avec amusement : "Il y a neuf ans que nous vivons ensemble et il m’est parfois arrivé de vivre des situations assez surréalistes en la voyant s’immerger complètement dans un personnage. À l’époque de l’écriture, elle préparait le film de Xavier Dolan et cela m’a amusé d’imaginer qu’elle doive travailler cet accent. Marion joue souvent des rôles complexes et c’est une vraie bosseuse. Je trouvais comique de lui faire dire qu’un rôle devait soit avoir un handicap, soit un accent".
Guillaume Canet et Marion Cotillard se sont amusés à jouer la carte de la promotion décalée pour Rock'n Roll, en publiant notamment des clichés instagram peu flatteurs d'eux-mêmes.
Il y a quelques années, Guillaume Canet souhaitait déjà tourner un faux documentaire qui jouerait sur les fantasmes générés par la notoriété. Son ambition ? "Arrêtez de croire tout ce que l’on vous raconte, de voir tout ce que vous pensez voir : il y a d’autres choses derrières, elles ne sont pas forcément meilleures, elles peuvent même parfois être pire. Elles ne sont, en tous cas, pas ce que vous croyez". Il a dû abandonner son idée à la sortie d'I'm still here de Casey Affleck, dans lequel Joaquin Phoenix mène prétendument une nouvelle vie de rappeur. "C’était exactement le documentaire que je voulais faire. J’ai laissé tomber", regrette l'acteur-réalisateur.
C'est après une interview que Guillaume Canet a eu l'idée précise de Rock'n Roll : "Il y a deux ans, une journaliste qui m’interviewait m’a parlé de moi dans des termes qui ne me correspondaient absolument pas. « C’est l’image que vous renvoyez aux gens », insistait-elle. Le désir de m’amuser avec mon image est revenu", se souvient-il.
Pendant l'écriture de Rock'n Roll, Guillaume Canet a dû se confronter au délicat exercice de l'auto-dérision. "Philippe Lefebvre, Rodolphe Lauga et moi, nous sommes vraiment lâchés. Mais, autant il m’était facile de me moquer de moi-même, je pouvais même être très trash, autant cela devenait plus compliqué lorsque c’était eux qui se permettaient d’émettre certaines idées peu flatteuses. Je m’y suis fait. J’y ai même pris beaucoup de plaisir", affirme-t-il.
Comment caster un film en partie autobiographique pour le rendre crédible ? En invitant à l'écran son véritable entourage, comme l'explique Guillaume Canet : "Il devait forcément s’agir des gens de mon entourage proche, professionnel comme personnel. Mon agent joue son rôle, Marion, mes copains… Jusqu’à mon ancien assistant avec lequel j’ai travaillé pendant huit ans et qui est un vrai personnage... Il n’y a que mon fils qui ne soit pas mon fils – je ne voulais évidemment pas le mêler à ça".
À l'origine, Alain Attal ne souhaitait absolument pas tourner dans Rock'n Roll. "Autant j’étais mort de rire en lisant la scène, autant j’étais pétrifié à cette perspective. Je ne suis pas acteur et, en tant que « vrai » producteur du film, j’avais d’autant moins envie qu’on loupe cette séquence à cause de mon inexpérience. Bref ça me terrorisait", confie-t-il. Le producteur, qui n'a aucun lien de parenté avec Yvan Attal, s'est finalement laissé convaincre pour un rôle moindre. "Je n’arrivais pas non plus à trouver un acteur inconnu pour l’interpréter. Un jour, j’apprends qu’Yvan Attal a envie de tourner dans Rock'n Roll. Je n’avais aucun rôle à lui proposer, je l’appelle pour le lui dire. Je raccroche. Et tout d’un coup, me vient une illumination : si je demandais à Yvan de dire les répliques importantes qu’aurait dû dire Alain, je pourrais peut-être convaincre ce dernier de participer au film. Et j’ai réussi…", déclare Guillaume Canet, soulagé.
Guillaume Canet voulait au départ tourner un petit film, avant de revoir ses ambitions à la hausse : "Au départ, j’avais dit à Alain Attal : « Tu verras, il n’y aura qu’un seul décor. On voit un peu le type chez lui, puis sur le plateau, c’est tout. » Et puis on a commencé à imaginer des effets spéciaux et cette fin à Miami, avec les crocodiles, le film a effectivement pris une autre dimension. Tout à coup, l’écriture exigeait cela", analyse-t-il. Le producteur a tout de suite abondé dans le sens du réalisateur : "Guillaume avait, c’est vrai, envie de tourner rapidement et avec une petite équipe, mais son propos se prêtait en réalité à un film plus important et plus il déroulait de nouvelles séquences, plus l’outil cinéma prenait le dessus sur le faux documentaire. J’ai encouragé ce chemin. Pour obtenir les acteurs qu’il souhaitait, réaliser les plans séquences qu’il désirait, et aller dans cette folie américaine de la fin du récit, cela supposait une équipe importante et des effets spéciaux".
Guillaume Canet a dû jongler avec les deux fonctions d'acteur et de réalisateur pour la seconde fois après Mon idole. Une expérience pas toujours évidente, malgré un important travail de préparation en amont : "Par moment cela peut être quelque peu schizophrène de jouer avec les comédiens tout en ayant suffisamment de recul pour voir ce que nous jouons. Le plus dur a été les 3 heures de maquillage tous les matins très tôt qui m’éloignait de mon équipe. J’étais en ébullition sur ma chaise", confie-t-il.
Cadreur de Guillaume Canet depuis Ne le dis à personne, Rodolphe Lauga avait cette fois des désirs d'écriture qu'il a anisi pu assouvir, en plus de la préparation de son propre long-métrage, La Source.
Selon Alain Attal, la phase finale de montage d'un film est un moment souvent délicat à vivre pour Guillaume Canet... Et Rock'n Roll n'a pas dérogé à la règle : "Avec Guillaume, l’accouchement final d’un film est toujours une période un peu difficile. Autant la gestation se passe bien, autant ce moment est compliqué", se souvient le producteur. "Il lui est souvent arrivé de me dire qu’un de ses films était fini alors que j’avais le sentiment qu’il ne l’était pas. Je ne le brusque pas, j’essaie de comprendre ses arguments puis, avec beaucoup d’honnêteté, je lui explique pourquoi j’estime, moi, que le travail n’est pas tout à fait terminé. Je suis convaincu qu’un film est une affaire de vérité. Il faut chercher et chercher encore, jusqu’à la trouver".
Après l'échec de Blood Ties, Guillaume Canet a voulu s'éloigner du cinéma pour se ressourcer. Il s'est remis à l'équitation, a repris la compétition, et a pris le temps de redéfinir la place essentielle du cinéma dans sa vie. Fort de ce recul, il a ainsi pu revenir à la réalisation avec un projet qu'il souhaitait à la fois léger et ambitieux, comme Rock'n Roll.