Parce qu'il faut croire que la Guerre Froide ne se terminera jamais, quitte à aller se poursuivre sur des terrains improbables, voici "Guardians", film de super-héros 100% russe qui prétend concurrencer le géant US dans un de ses domaines de prédilection !
Sous l'égide d'un programme militaire russe top-secret, des rigolades de symboles russes... heu, pardon... un homme-ours, un téléporteur fan de grandes faucilles, une gymnaste invisible et un barbu faisant léviter des pierres s'allient pour contrecarrer les plans d'un méchant d'une laideur sans nom, ayant les capacités d'une télécommande universelle sur tous les appareils proches de lui, à la tête d'une armée de clones et voulant mettre la main sur un ancien satellite pour détruire le monde (ah oui, il est très méchant, hein !)...
On pourrait regarder "Guardians" avec un peu de tendresse, se dire qu'avec un budget de 5 petits millions de dollars, les Russes ont au moins essayé de faire leur petite tambouille super-héroïque basée sur le fantasme de leur propre histoire commune de leur côté. Sauf que non ! Absolument pas ! On en vient tellement à envisager un internement volontaire dans un goulag pendant le visionnage de "Guardians" qu'il est impossible de pardonner quoi que ce soit à une telle purge !
Caricature d'une caricature d'un sous-Marvel, l'histoire du film ne dépasse pas son pitch de départ et n'est là que pour enchaîner sans queue ni tête les scènes d'action à effets spéciaux le plus rapidement possible. Fait assez remarquable, aucun personnage n'a le temps de s'imprimer dans nos esprits ! Les Guardians n'existent pas individuellement (non, raconter chacun à tour de rôle son petit trauma personnel à sa supérieure, si émue qu'elle en a toujours les yeux embués, ne suffit pas à les définir) ni collectivement (embêtant pour un film qui se veut sur la genèse d'une équipe), ils sont simplement aussi translucides que leur collègue gymnaste, seulement là pour exercer leurs pouvoirs qui n'ont plus grand chose d'impressionnant aujourd'hui (le téléporteur est le vecteur des scènes les plus réussies, l'homme-ours... ben... le contraire). Les autres humains ne sont représentés que par une militaire/playmate sortie des années 80 en guise de patronne d'équipe, des jeunes mannequins/soldats et quelques personnages dont l'âge avancé est forcément synonyme de traîtrise.
Schématique au possible, le récit passe par la réunion en quelques minutes de ces superhéros de pacotille (isolés pour des raisons obscures puisqu'ils reviennent au bercail en trente secondes), une première confrontation avec le super-vilain qui se solde forcément par un échec, un rebootage sous forme de nouveaux costumes et d'entraînements de la mort-qui-tue (d'ailleurs ces derniers s'éternisent à un point que l'on en vient à se demander pourquoi le méchant patiente tout aussi longtemps pour mettre son plan débile à exécution) et, bien entendu, l'inévitable combat final. Aucune surprise, rien, niet ! Même pas sauvé par ses scènes de blockbuster qui, si elles ne sont pas trop honteuses, provoquent en nous au mieux un léger sourcillement nous rappelant qu'on est toujours en vie pour assister à ce calvaire, "Guardians" est juste un décalque raté de stéréotypes du genre tournant à la farce plus vraiment supportable au bout d'à peine à un quart d'heure de film.
Il ne reste plus alors qu'à sourire devant quelques répliques mémorables telles que "Si quelque chose devait m'arriver et que je devenais un ours pour toujours, empêchez l'irréparable !" mais cela reste une maigre consolation...