Min Bahadur Bham, réalisateur du film, est né et a grandi dans le nord du Népal. Avant de devenir une figure représentante du cinéma népalais, il a connu les conflits qui ont agité le pays entre 1996 et 2006. Marqué par ceux-ci et par un système de castes qui séparait les individus, Bham ne put partager autant de moments qu'il le souhaitait avec son meilleur ami de l'époque, d'une caste inférieure, avec lequel il avait même envisagé d'élever une poule. Un vécu qui hante en retour Kalo Pothi, un village au Népal.
C'est en 1996 que le Népal connut le début d'une guerre civile destructrice, qui fit environ 13 000 morts et des centaines de milliers de personnes en fuite. Le conflit opposa le parti communiste du pays, composé de maoïstes, face à une monarchie qu'ils jugeaient corrompue. Les deux utilisèrent des techniques de torture et d'extorsion, à laquelle s'ajoutaient l'imposition de taxes par les maoïstes. Le conflit s'acheva par un accord de paix en 2006 et l'instauration d'une république fédérale démocratique. Celle-ci n'empêcha pas Min Bahadur Bham de voir son tournage compliqué par la Police et le parti maoïste, particulièrement lorsqu'il filma dans le Parc national.
On ne peut pas dire que le tournage de Kalo Pothi fut de tout repos pour Min Bahadur Bham et son équipe. Le Népal est un pays constitué d'une variété de paysages, ce qui constitua une difficulté pour toute la troupe du film, qui dut parfois marcher cinq jours pour atteindre les lieux de tournage, situés dans un des endroits les plus reculés du pays. "La population de cette région vit comme au 18è siècle", explique Bham. A cela se rajouta sur le calendrier de tournage la fête de Dashain, célébration traditionnelle qui occupe toutes les castes du pays durant quinze jours.
En plus d'arpenter des lieux difficilement praticables, Min Bahadur Bham dut conjuguer avec une population peu préparée à la conception même d'un tournage cinématographique. En plus d'être, selon le réalisateur, composés à plus de 80% illettrés, les figurants manquaient à l'appel puisque le tournage entra en collision avec la saison des récoltes, poussant les villageois dans les champs. Parmi les gens "craintifs, mais en même temps excités de nous accueillir dans leur village", Bham choisit deux enfants triés sur plus de neuf-cent, à travers dix-sept villages différents.
Min Bahadur Bham travailla avec le chef-opérateur kazakhstan Aziz Zhambakiyev afin d'éviter la sublimation des paysages du Népal au détriment de l'histoire.
Premier film népalais sélectionné à la Mostra de Venise, Kalo Pothi, un village au Népal en repartit avec le prix du meilleur film de la Semaine de la Critique. Il participa également au festival de Busan.