Synchronicity me rend septique; s'il sonne assez laid suite à son manque de budget, il fait preuve de tellement d'efforts d'écriture qu'il paraît injuste de le considérer comme les autres daubes du genre sorties chaque année, et qui n'apportent rien d'autre que du temps perdu. Avant d'en parler plus en profondeur, on éviter de développer sa version française catastrophique, sans émotion ni once de vivacité; l'on croirait qu'ils lisent des dialogues qu'ils viennent de découvrir, si mal que les voix ne collent pas au mouvement des lèvres.
Passé cela, et c'est dur d'y parvenir, on pourra se concentrer sur le scénario tortueux qu'il nous amène, complet par sa crédibilité scientifique et la justesse de son rythme. Car si le film possède un certain côté série b, il n'y a pas de doute sur le fait qu'il est directement intéressant par les thèmes qu'il rebat et les personnages qu'il nous présente. On croirait presque voir une sorte de Jeff Goldblum de La Mouche version Ashton Kutcher de L'Effet Papillon, le ton sombre et la dépression en moins.
S'y présentera le très sympathique Michael Ironside, revenu pour faire une référence à l'écran d'affichage d'entrée d'appartement dans Total Recall, et qui joue, comme à son habitude, l'antagoniste de l'histoire (si l'on peut vraiment parler d'antagoniste). C'est d'ailleurs en cela que Synchronicity surprend : il n'a de méchant qu'Ironside parce qu'il représente la tromperie de Brianne Davis (Abby), et ne développe pas de thèmes manichéens, préférant nous développer des personnages et les rendre psychologiquement intéressants, humains et attachants.
Loin d'être cependant un modèle d'écriture, Synchronicity, par le fait de rendre agréable ses protagonistes (qu'on peut compter sur les doigts de la main), rend dès lors son écriture appréciable, et nous fait nous intéresser à son intrigue, à ses rebondissements et ses grands changements. Au point qu'on le trouve finalement sympathique mais à force de l'analyser et d'être surpris, se dira-t-on qu'il manque tout de même d'un sacré niveau de cohérence.
A cela, les scénaristes répondent par la révélation qu'il ne traite pas de voyage dans le temps, mais bien de Terres parallèles. Opportunistes ou malins, ils nous conduisent, main dans la main, vers la compréhension de toutes ces scènes qu'on trouvait pathos, forcées, et pour lesquelles le comportement des personnages manquait de fluidité, de naturel, de réalisme. Dès qu'on a toutes les cartes en main, l'intrigue prend une toute autre dimension et ses moments dramatiques gagnent en crédibilité, tandis que se profile une fin certes prévisible, mais agréable du fait qu'on s'est déjà attaché à ces quelques rares personnages.
Seulement, Synchronicity, derrière ses airs de film indé qui tente des choses (c'est sûrement sa plus grande qualité), se gâche par son imagerie héritée du Blade Runner de Ridley Scott et qui, par son constant timbre bleuté (le même que celui de l'affiche), s'enferme dans une personnalité visuelle monochrome et sans grand relief, si ce n'est quelques références visuelles (Hitchcock revient plusieurs fois). Une mise en scène à la hauteur de l'interprétation de ses acteurs : plate, fade, superficielle et sans ampleur, tout cela nous conduire vers le ressenti d'avoir vu quelque chose de médiocre, ni bon ni mauvais, de profondément moyen mais d'au moins marquant, tant on se rend rapidement compte qu'il tente énormément de choses, et qu'il tente d'apporter quelque chose à son spectateur. Et cela, il y parvient.
Faîtes nous en un remake en gros budget, avec des artistes à la hauteur, s'il vous plaît.