Guibord s'en va-t-en guerre est le premier scénario original pour Philippe Falardeau depuis Congorama en 2006. Le metteur en scène explique que le projet est né lors une soirée dans un bar en compagnie du cinéaste et ami André Turpin. C'est ce dernier qui a émis l'idée d'un député qui, étant le seul à ne pas avoir annoncé ses intentions à quelques jours d’un vote libre au Parlement (sur l’avortement ou la peine de mort), se retrouve avec le vote décisif. Dès lors, les lobbys accourent pour tenter d’influencer son vote. Philippe Falardeau se souvient :
"Je lui ai demandé, « Puis après ? ». Il m’a répondu, « Après, ça te regarde ! ». Le récit restait à trouver. L’enjeu aussi. J'ai ensuite eu un coup de pouce de deux autres amis cinéastes. J'ai d'abord fait un premier voyage de recherche en Abitibi avec Vincent Lannoo [réalisateur belge de Strass, Au nom du fils. ndlr]. Comme le politique et l’absurde alimentent régulièrement l’imaginaire cinématographique belge, Vincent a été un collaborateur inspiré lors de cette genèse. Il m'a aidé à regarder d’un oeil oblique une réalité québécoise qui m’était familière. Pour lui, tout était intéressant, nouveau et potentiellement riche en humour. Plus tard, alors que le scénario en était à sa huitième ou neuvième version, j’ai fait appel à Stéphane Lafleur. J’étais un peu bloqué sur le plan du récit car je craignais que la comédie vienne saborder le propos politique. Stéphane a été d’une aide précieuse pour identifier les enjeux importants et pour pousser d’avantage l’humour."
Les sources d'inspirations du politicien (et ex-joueur de Hockey) campé par Patrick Huard sont très variées. Il y a ainsi eu le joueur de hockey Joé Juneau qui, lorsqu’il a pris sa retraite, a employé ce sport comme activité structurante auprès des jeunes autochtones. Philippe Falardeau raconte également avoir été influencé par le documentaire de Manuel Foglia, Chers électeurs, qui suivait pendant dix-huit mois Daniel Turp, député péquiste de Mercier, et Charlotte L’Écuyer, députée libérale de Pontiac. Le réalisateur avait aussi rencontré l'ex-député Marc Lemay qui lui a fait faire une tournée de son comté.
Le film a été tourné à Val d'Or, à plus de 500 km de Montréal. Philippe Falardeau cherchait un comté éloigné des grands centres urbains, dont les enjeux ne sont pas forcément alignés sur ceux du reste du pays. "Camper l’action dans le Nord du Québec (sans nommer précisément une région) me permettait de parler des routes, des autochtones, des ressources naturelles, etc. Si j'avais fait ce film en ville, il y aurait eu beaucoup de salles de réunion, où la joute politique se joue habituellement. Qui a envie de voir des salles de réunion au cinéma ? À la campagne, le road movie s’impose. C’est plus cinématographique", confie le cinéaste.
Au stade de l’écriture, Philippe Falardeau n'avait pas encore en tête l’humoriste Patrick Huard pour se glisser dans la peau du député fédéral Guibord. Ce n'est que quelques mois avant le début du tournage que le réalisateur a pensé à lui. Il se souvient :
"Je regardais la cérémonie des Jutra à la télévision, durant laquelle il a prononcé un discours dans le cadre de l’hommage rendu à la cinéaste Micheline Lanctôt [Sonatine, Pour l’amour de Dieu, ndlr]. J’ai perçu dans sa façon de s’exprimer, dans sa générosité et dans l’ouverture de son visage, une maturité que je ne lui connaissais pas. J'ai tout de suite envoyé un courriel à mon producteur Luc Déry. Au même moment, Luc, qui était assis dans la salle, m’envoyait un message texte avec la même idée."
Philippe Falardeau retrouve Suzanne Clément qu’il avait dirigée dans C’est pas moi, je le jure !.
Pour trouver l'interprète du stagiaire Souverain, un étudiant haïtien en sciences politiques, la directrice de casting Lucie Robitaille a fait un énorme travail de recherche auprès de la communauté haïtienne québécoise, au moyen notamment d’affichages et de casting sauvage. L'acteur Irdens Exantus est alors apparu au moment des auditions. Il n’avait pas vraiment d’expérience mais en revanche avait de l'instinct et du talent.
Philippe Falardeau collabore pour la troisième fois avec le compositeur Martin Léon. Le metteur en scène explique : "Pour ce film, plus que jamais, j’avais besoin d’un thème fort, propulseur. Guibord rencontre beaucoup d'obstacles qui ponctuent sa quête. J’avais besoin d’un thème qui donne au spectateur la certitude que le film continue d’avancer. Nous avons donc commencé à échanger des pièces qui nous inspiraient. Je lui ai fait écouter la trame sonore d’Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon composée par Morricone. Martin, lui, m’a fait entendre la pièce Bo Mambo d’Yma Sumac dans laquelle j’ai tout de suite reconnu les accents de folie et d’exaltation que je recherchais. J'ai décidé que le film s'ouvrirait avec cette pièce, et Martin a pu se lancer sur une piste concrète avec cette musique comme point de départ. Quelques semaines avant le tournage, après plusieurs maquettes, Martin m’a écrit un courriel très laconique où il me disait : « J’ai trouvé ». Avec mes producteurs, nous avons été soufflés par le ver d’oreille que Martin nous a envoyé. C’était parfait. Pour la première fois de ma vie, j’avais le métronome du film avant de commencer."