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    L'étreinte du serpent
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "L'étreinte du serpent" et de son tournage !

    Laisser tomber

    Un tournage en forêt amazonienne est bien souvent synonyme de grosses difficultés, ce qui a été le cas sur L'étreinte du serpent. Le metteur en scène Ciro Guerra avoue même qu'il a failli abandonner le tournage tant les problèmes affluaient : "Alors qu’on terminait la première semaine de tournage, je me suis senti submergé par une profonde inquiétude. On avait trop de problèmes, le plan de tournage était trop serré. Il était clair que l’on n’arriverait jamais à terminer ce film. On avait eu des rêves démesurés, on avait voulu aller trop loin. On avait pêché par excès d’optimisme et les dieux et la forêt nous puniraient pour cela. En ayant cela à l’esprit, comme un capitaine qui est le premier à constater que son bateau coule, je me suis assis, bien confortablement, et je me suis préparé à affronter l’inévitable. Mais j’ai finalement assisté à un miracle."

    L’Amazonie colombienne

    Le film est né de la curiosité de Ciro Guerra pour l’Amazonie colombienne, un lieu immense et mystérieux qui représente la moitié de la surface du pays. Bien qu'étant Colombien, le cinéaste ne connaissait pas vraiment cet endroit sauvage tout comme beaucoup d'habitants du pays : "Dans l’ensemble, la Colombie s’est toujours désintéressée de ce savoir et de cette façon de voir le monde. C’est une partie de notre pays que l’on sous-estime mais qui, pour ce que j’ai pu en connaître, me semble fondamentale. Quand on commence à étudier cette région, à faire des recherches, on la découvre inéluctablement à travers le regard des membres d’expédition, des voyageurs, presque tous nord-américains ou européens, qui sont les premiers a être venus jusqu’ici et nous ont donné des informations sur notre propre monde, sur notre propre pays. J’ai donc eu l’idée de raconter une histoire au travers du prisme de cette rencontre, mais depuis une perspective dans laquelle le personnage principal ne serait pas un Blanc, comme d’habitude, mais un Indien, un autochtone, ce qui change absolument le point de vue et est novateur. En réalité, ce qui se passe finalement, c’est que ce personnage, Karamakate, est peut-être le premier héros indien du cinéma colombien, mais c’est aussi une personne avec qui n’importe qui dans le monde peut s’identifier."

    Laisser une trace

    Ciro Guerra explique que, bien qu'au départ un peu méfiants devant l'équipe de tournage, les gens vivant dans la forêt amazonienne sont très chaleureux et ont un grand coeur. A travers ce film, le réalisateur a cherché à rendre hommage à ces populations et laisser une trace de ces dernières (dont les modes de vies sont menacés) dans la mémoire collective.

    Une autre façon de voir le monde

    Ce processus de recherche et d’apprentissage des cultures indiennes qui a accompagné la totalité du tournage du film a complètement changé la manière de voir le monde pour Ciro Guerra et le reste de l'équipe : "On s’immerge dans ce flot de connaissances et tous les jours on apprend quelque chose de nouveau. On a senti que tout était source de savoir, depuis les pierres jusqu’aux plantes, aux insectes ou au vent. Cela nous a procuré un grand sentiment de satisfaction. Cela change tout l’univers. Évidemment, il est très difficile de changer de vie pour les gens comme nous, qui ont grandi au sein de ce système, mais cela nous a quand même permis de voir de près d’autres façons de vivre et de comprendre qu’il y a de multiples façons d’être humain et de vivre. Je crois que celle-ci est tout à fait valable et belle, et qu’il est important d’en avoir conscience et de la respecter."

    Des acteurs indiens

    Pendant le tournage, les journées de travail étaient à la fois longues et intenses, pouvant atteindre 15 à 16 heures. L'acteur belge Jan Bijvoet a bien sûr eu du mal à encaisser ce rythme éprouvant, mais insitste sur le côté enrichissant de cette expérience unique que de jouer avec des acteurs indiens : "Le travail des deux acteurs a été fantastique. Mieux que le travail de nombreux professionnels. Ils ont beaucoup préparé leur rôle, beaucoup répété, mais surtout, ils savaient de façon innée quel regard, quels gestes avoir. Non seulement ils savaient leur texte par coeur, mais ils avaient du charisme. En réalité, ils n’avaient presque pas à jouer, tout ce qu’ils faisaient coulait de source."

    Authenticité

    Antonio Bolívar, qui joue Karamakate vieux, habite dans la ville de Leticia située au sud de la Colombie près des frontières du pays avec celles du Brésil et du Pérou. Il avait déjà travaillé sur d’autres films, qu’il préfère oublier parce qu’il estime qu’ils n’ont pas respecté sa culture. Antonio n’a pas seulement joué dans L’étreinte du serpent, il a fait office de traducteur pour l’équipe et a aussi servi de coach aux acteurs étrangers. Il a accepté de travailler sur le long métrage parce qu'il montre selon lui l'Amazonie et sa culture de manière juste.

    Des mythes d'Amérique latine

    "Le cinéaste s'affronte avec des mythes d'Amérique Latine", selon Edouard Waintrop, délégué général de la Quinzaine des réalisateurs.

    En sélection à Cannes 2015

    L'étreinte du serpent de Ciro Guerra a été sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2015.

    Angle

    Le film raconte l’histoire de deux temporalités différentes, s’inspirant des récits de deux membres d’expédition qui ne se sont jamais rencontrés. Ciro Guerra explique comment s’est déroulée la phase d’écriture et comment il est parvenu à trouver le fil conducteur pour raconter cette histoire :

    "On retrouve l’idée, dans de nombreux textes sur le monde indien, d’une notion différente du temps. Le temps n’est pas une continuité linéaire, tel que nous l’entendons en Occident, mais une série d’évènements qui ont lieu simultanément dans plusieurs univers parallèles. C’est ce qu’un écrivain a décrit comme « le temps sans temps » ou « l’espace sans espace ». J’ai fait le lien avec cette idée des aventuriers qui mentionnaient le fait que, bien souvent, lorsque l’un d’eux revenait 50 ans après le passage d’un autre, l’histoire du premier avait déjà pris la forme d’un mythe. Pour beaucoup de communautés, c’était toujours la même personne qui revenait parce que l’idée d’un seul homme, d’une seule vie, d’une unique expérience vécue à travers de nombreuses personnes était profondément ancrée. Cette idée m’a semblé être un point de départ très intéressant pour le scénario parce que, bien que ce soit un film raconté du point de vue des Indiens et dont le personnage principal est un Indien, il offrait au spectateur des points d’accroche par le biais de ces personnages qui viennent de notre monde et dont on comprend les motivations. Puis, lentement, à travers eux, on cède le pas à la vision du monde indien que nous offre Karamakate."

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