En l’espace d’une dizaine d’années, Jaume Balagueró est tristement passé du statut de petit maître de l’horreur, aura obtenue grâce à [Rec], ‘Darkness’ et ‘La secte sans nom’, à celui d’illustre inconnu - Jaume qui ? - de l'industrie. L’évaporation du réalisateur fut telle que ce ‘Muse’ n’est, à ma connaissance, jamais sorti au cinéma ni même sur les plateformes de streaming…et après l’avoir vu, on comprend tout de même un peu pourquoi. Néanmoins, sans révéler trop d’éléments de l’intrigue, ‘Muse’ aurait pu être une chouette production fantastique, grâce à la façon plutôt originale dont il aborde certaines figures mythologiques, qui n’ont que rarement été exploitées par le cinéma et certainement jamais en tant qu’entités maléfiques. Malheureusement, ces bonnes intentions s’écrasent sur plusieurs constats désagréables, qu’on n’aurait jamais cru devoir associer à un réalisateur comme Balagueró. Si le fond demeure intéressant sur le papier, le réalisateur n’arrive jamais en tirer quelque chose de passionnant, de poignant ou même simplement d’angoissant, et même les quelques munitions que ‘Muse’ garde en réserve, sont amenées avec une telle désinvolture qu’elle sont accueillies avec une indifférence totale : ce film à la durée standard laisse dès lors l’impression d’être interminable. D’autre part, bien qu’il se déroule en Irlande (choix géographique dont le film ne tire pas grand chose), la manière dont se construit son atmosphère ne laisse l’impression que d’un recyclage fatigué de tout ce qu’était le style Balagueró dans les années 2000 : hôpitaux psychiatriques désaffectés, vieilles dames malaisantes maquillées comme des cadavres sous leur voile de crêpe, ciel plombé et pluviosité déprimante, musique opératique grandiloquente. Jamais je n’aurais pensé que la crème du cinéma d’épouvante espagnol d’il y a quinze ans aurait pu connaître une telle descente aux enfers.