Philippe Ramos adapte son "court", "Ici bas", pour un 4e "long" - une histoire elle-même inspirée de faits réels : le double crime du "curé d'Uruffe" (fin des années 50) - Guy Desnoyers ayant lui échappé à la guillotine (mort nonagénaire en 2010, ayant été libéré en 1978, après 22 ans de réclusion criminelle). On est là devant une oeuvre (PR est aussi directeur de la photo) d'une beauté quasi-picturale, où l'on peut (notamment) relever un réalisme à la Courbet ("la tête qui parle", cet étrange récitant, n'étant, par ailleurs, pas sans rappeler "Le Désespéré", l'auto-portrait du peintre) et un romantisme symbolique à la Friedrich, dans le traitement de la nature (en particulier lors de l'épisode du "Désert"). C'est aussi une oeuvre très littéraire, faisant se succéder des tons et des manières maîtrisés, de la farce au drame, des pittoresque et truculent au lyrique, du conte immoral avec prêtre libertin dans la tradition du 18e au conte moral (même si le fond de l'affaire est celui d'un fait divers, et la "morale" plutôt atypique), avec des bouffées mystiques rappelant le récit d'une autre "faute", celle de l'abbé Mouret. Le tout dans une langue d'un délectable raffinement classique, où l'on répète Shakespeare, lit "Ruy Blas" à haute voix, ou cite le "Cantique des cantiques". Melvil Poupaud est remarquable dans ce rôle complexe, celui du "Fou d'amour"
(d'amour de soi, surtout....plus que de celui de "Rose", la jeune "aveuglée", dans tous les sens du terme).
Citons aussi en "vieille maîtresse" ("Armance") Dominique Blanc, toujours parfaite (déjà dans "Capitaine Achab", en 2008). Soulignons encore l'excellence du montage (PR en charge, également) et le choix des musiques. Un film estimable, tranchant avec éclat avec l'habituelle étroitesse d'inspiration de la grande majorité du cinéma hexagonal !