Alors qu'il vient de découvrir un film de 1902 montrant qu'un terrible crime avait été perpétré dans sa propre maison, un archiviste (Rupert Evans) soupçonne sa femme d'entretenir une relation adultère avec un collègue de travail...
Typiquement le genre de film dont on ne sait s'il faut saluer l'ambition cinématographique le distinguant du tout-venant de l'épouvante ou maudire le fait qu'il la met en pratique pour raconter une histoire qui, elle, va aller justement se fondre dans la banalité du genre.
"The Canal" nous place donc dans l'esprit d'un homme dont les piliers vitaux de sa structure familiale volent en éclats pour laisser peu à peu place à la folie, la question étant évidemment de savoir si celle-ci est induite par son propre regard ou par des forces surnaturelles en relation avec le passé violent de sa maison. Vous pensez tout connaître de ce type d'intrigue ? "The Canal" ne vous contredira jamais vraiment sur ce point en allant emprunter la frontière presque désormais habituelle entre le drame psychologique et l'épouvante. Il faut hélas le reconnaître, l'histoire, bien trop convenue à elle seule, ne dispose pas assez d'arguments pour aller bousculer les codes que l'on a tous appris en visionnant les grands noms du genre.
Mais, heureusement, "The Canal" a à sa tête, Ivan Kavanagh, un réalisateur/scénariste qui va réussir à transcender les lieux communs de son propos par son amour des classiques de tout un pan majeur du cinéma d'épouvante. Sorte de medley ultime ultra-référencé (on pense en vrac à Polanski, Kubrick, Argento, au cinéma asiatique avec ses spectres capillairement degoûtants et même au plus récent "Sinister"), le traitement formel du film est assez bluffant grâce à un jeu de contrastes sur les couleurs et les lumières qui semblent laisser les ténèbres des vieilles bobines visionnées par le personnage principal envahir peu à peu l'image (celles-ci ont d'ailleurs été véritablement tournées par une caméra d'époque), à un sens aigu du montage dans la manière de créer des surprises de liaisons abruptes, à une réalisation toujours judicieuse nous plaçant littéralement dans les yeux de son héros en train de guetter la moindre apparition suspecte dans chaque recoin de l'écran pour nous faire questionner sur leur véracité ou non et, enfin, à un travail fourni sur le son qui réussit à capter à chaque instant notre attention lorsque la situation l'exige (les espèces de murmures étouffés accompagnant les manifestations d'un spectre féminin marqueront, à ce titre, une jolie montée sur la jauge de trouillométrie). Toute la somme de ce travail cinématographique impressionnant aboutit sur une ambiance à couteaux tirés qui, dès les premiers instants, vous harponne pour ne plus jamais vous lâcher en en augmentant perpétuellement la tension.
À l'instar du héros superbement campé par Rupert Evans et pris dans la spirale sans retour de son enquête, "The Canal" parvient à vous prendre dans sa toile et ce, même si vous semblez tout connaître du prédateur qui l'a tissé.
On aurait juste tellement aimé que les dernières minutes du film réellement surprenantes, elles, reflètent une prise de risques de l'ensemble de l'intrigue. Au final, on nous a simplement raconté une histoire que l'on avait déjà en tête dans son intégralité dès les premières paroles mais son narrateur était tellement bon que l'on n'a pu s'empêcher de l'écouter jusqu'au bout...