Les Chebabs de Yarmouk a été entièrement tourné dans l'appartement que partagent les jeunes du film, à l'exception de quelques scènes filmées du haut du toit et qui dévoilent l'ampleur du camp. Le réalisateur explique : "La clandestinité du tournage imposait de rester dans le camp et à l’intérieur des appartements ou sur les terrasses. Cette contrainte était donc pour moi le dispositif même du film. Par chance, l’essentiel du film a été tourné dans deux appartements situés sur les toits, ce qui me permet de filmer le camp depuis les immeubles."
Le camp de réfugiés de Yarmouk existe depuis 1955. Il est aujourd'hui en partie détruit par les bombardements et bloqué par un embargo alimentaire depuis le début de la guerre.
C'est en 2006, alors qu'il est encore étudiant en anthropologie, qu'Axel Salvatori-Sinz fait la rencontre des jeunes chebabs de son documentaire. L'envie de faire un film sur cette bande d'amis lui est venue tout de suite, mais le jeune homme n'avait pas les compétences pour faire un film. Cinq ans plus tard et un master en réalisation en poche, il retourne à Yarmouk pour raconter leur histoire, leur combat et leurs envies.
Pour tourner Les Chebabs de Yarmouk, Axel Salvatori Sinz a dû faire preuve d'une grande prudence. Il a ainsi décidé de voyager jusqu'à Beyrouth (au Liban) et d'arriver en Syrie par taxi, afin d'éviter les fouilles et la censure à Damas. Sur place, le jeune homme a habité dans un appartement aux côtés de ceux qui sont devenus ses amis et n'a filmé presque qu'à l'intérieur, n'ayant pas le droit de filmer dans les rues.
La télévision syrienne s'est emparée du teaser du film et l'a remonté en y insérant des images de bombardements, transmettant ainsi un message différent que celui voulu par le réalisateur (montrer le parcours de jeunes et leurs doutes).
Il était important pour Axel Salvatori-Sinz de montrer les jeunes de son film comme des êtres humains victimes d'un conflit et non pas comme des Palestiniens. Il explique : "Pour moi, avant d’être des réfugiés palestiniens en Syrie, ce sont des êtres humains. Je voulais qu’on les aborde comme tels. On aurait pu tourner les Chebabs n’importe où !"
Les Chebabs de Yarmouk a été financé en partie grâce à la plateforme Ulule, qui permet au public de participer à la création de projets.
Les Chebabs de Yarmouk a gagné, entre autres, l'Audience Award à l'IBAFF, le Festival International du film de Murcia, le Prix Regard Neuf pour le meilleur premier long métrage et la Mention spéciale du Jury interreligieux pour le Festival Visions du Réel en 2013 et le Grand prix du jury au festival Territoires en Images de 2014.
Les rapports entre les jeunes "chebabs" et le réalisateur sont rapidement passés d'une relation professionnelle à une relation amicale. Axel Salvatori-Sinz précise : "Je ne suis pas arabophone, mais j’ai le niveau suffisant pour saisir de quoi on parle. Très vite, j’ai compris qu’on avait le même âge, à quelques années près, les mêmes questionnements, les mêmes rêves. Ce qui nous différencie, au fond, c’est mon passeport qui me permet d’aller du jour au lendemain, dans 90 % des pays du monde. Petit à petit, la confiance s’est installée. A la fin, je faisais partie de la bande. L’évolution de notre relation est d’ailleurs visible dans le film."
La scène de la confession d’Ala’a a été perçue, pour le réalisateur, comme une sorte de cadeau de la part du jeune homme. Rentré de l'avortement de sa compagne, il s'est assis sur le canapé, a écouté de la musique et a soudainement demandé à Axel Salvatori-Sinz de prendre sa caméra et de filmer son témoignage.
Les "chebabs" du film ont aujourd'hui quitté la Syrie et se sont installés en France, au Chili, au Liban, à l'exception d'Hassan, activiste, qui a été tué en 2013.