Toril a remporté le Prix du Meilleur Premier Film au Festival International du Film de Varsovie.
Toril est le premier long-métrage de Laurent Teyssier. Le cinéaste avignonnais, passé par une école de cinéma de Montpellier, s'était fait remarquer en 2009 avec son court-métrage 8 et des poussières : "On prête généralement aux premières oeuvres une forte implication autobiographique ; c’est en effet le cas pour moi et mon co-scénariste et complice de longue date, Guillaume Grosse. Nous venons tous les deux de cette région que nous avons commencée à explorer cinématographiquement dès 2009, dans mon premier court métrage, 8 et des poussières : un certain sud, entre Avignon et Cavaillon, dans le monde des agriculteurs et des négociants, celui de nos parents. Ces paysages ont certainement créé une empreinte sensorielle qui nous constitue et que nous nous sommes évertués à restituer dès l’écriture", confie le réalisateur.
Guillaume Gouix était précédemment associé au long-métrage. C'est finalement Vincent Rottiers qui assure le rôle principal.
Le réalisateur Laurent Teyssier et le scénariste Guillaume Grosse ont bénéficié d'un "temps de résidence d'écriture" dans la fameuse maison bleue située dans la commune de Saint-Julien-en-Born/Contis dans les landes. Leur dossier a été retenu par un jury de professionnels qui a pour but d'aider des auteurs prometteurs en leur proposant un "cadre propice" à l'écriture. Ce programme est mis en place et soutenu par le Conseil Départemental des Landes et la Communauté de Communes Côté Landes Nature.
Toril est le nom de la pièce dans laquelle est enfermé le taureau avant son entrée dans la corrida. Ce mot est emprunté de l'espagnol. Avant d'être rebaptisé Toril, le film avait pour titre "Mauvais oeil" : "Pendant notre résidence à Contis, dans les Landes, nous avons pu remettre à plat un scénario résolument trop noir en repartant d’un séquencier. Un luxe nécessaire ! C’est là que nous avons pensé aux taureaux et que nous avons fait de José, qui représente la figure du mal, un manadier. Nous voulions prendre un certain contrepied de ce qu’on attend d’un personnage de gangster dans un film noir. La manade et le bétail, ça nous embarque ailleurs. Nous avons alors pensé que Philippe devait avoir un pied dans cet univers-là et décidé qu’il serait raseteur. Puis est venue l’idée qu’on devait le voir courir et donc de cette ouverture où il se jette le premier dans l’arène", expliquent Laurent Teyssier et Guillaume Grosse.
Le tournage s'est déroulé du 26 mai au 6 juillet 2015 à Nîmes, Marseille, Cavaillon, Port-Saint-Louis-du-Rhône, Salin-de-Giraud, Fos-sur-Mer, l’étang de Berre, Arles et Chateaurenard. Le réalisateur Laurent Teyssier, originaire d'Avignon, a tenu à tourner Toril dans sa région natale afin de plonger le spectateur dans des lieux assez peu filmés au cinéma.
Laurent Teyssier et Guillaume Grosse ont voulu témoigner, avec Toril, de la détérioration inexorable de leur région natale Provence-Alpes-Côte d'Azur : "L’envie d’écrire ce film noir est venue en voyant ma ville s’enfoncer dans une crise économique et politique, dont l’explosion du trafic de stupéfiants est le symbole le plus violent. Aujourd’hui, Cavaillon est plus connu pour les règlements de comptes, les saisies records, que pour son marché paysan. Cette évolution me semblait être le terreau d’une vraie tragédie sociale, comme peuvent les peindre les films noirs qui m’influencent", indique Guillaume Grosse. Toril est aussi une sorte variation sur la crise du monde agricole : "L’aspect documentaire sur la crise du monde paysan était beaucoup plus affirmé dans les premières versions du scénario, avant qu’on le réoriente franchement vers le film de genre. Je pense que ça nourrit encore le film, même si ce n’est plus si présent", ajoute Teyssier.
Guillaume Grosse avoue avoir été fortement influencé par Les anges aux figures sales de Michael Curtiz pour écrire Toril. Quant à Laurent Teyssier, il revendique l'influence des films de Michael Mann, James Gray ou Jeff Nichols.
Après une phase de casting longue et compliquée, Laurent Teyssier a jeté son dévolu sur le jeune Vincent Rottiers pour le rôle principal, celui de Philippe : "Vincent Rottiers n’était pas seul en lice pour le rôle de Philippe, mais ses essais étaient magiques, il était le rôle ! Aujourd’hui, je me demande comment le film aurait pu se faire sans lui. Il est techniquement très impressionnant devant une caméra, le jeu chez lui c’est une seconde nature", s'enthousiasme le cinéaste.
Pour les besoins du tournage, l'équipe a fabriqué de faux pains de cannabis avec un ingrédient plutôt saugrenu, le henné. Elle a également mis en place une serre avec des plants de chanvre 2 mois avant les premières prises de vue.
Toril a été financé pour un peu moins de 2 millions d'euros, notamment par la société marseillaise Tita Productions.
Laurent Teyssier nous parle de sa manière d'appréhender la mise en scène sur un plateau : "Quand on veut rentrer dans le moment présent, donner l’impression que c’est ici et maintenant, je choisis de cadrer en caméra portée. En revanche, j’aime que les plans plus impressionnants soient tournés avec la caméra sur pied, on oublie l’appareil et les plans gagnent en intensité. Pour Toril, nous avons fait le choix de tourner en scope, avec un seul zoom et trois focales fixes. Quand tu n’as pas un gros budget, ça t’oblige souvent à resserrer tes choix, comme tes cadres."
C'est Lionel Corsini alias DJ Oil qui a composé la musique de Toril : "Je lui ai d’abord demandé de travailler sur un son un peu oriental ; il nous a proposé des nappes de son hypnotiques et lancinantes, sur lesquelles on a ensuite remis du rythme, des percussions africaines, un son plus dramatique, plus mat et plus sourd. Quand j’ai commencé le montage, j’avais une trentaine de maquettes à disposition, dont ce générique de début qui n’a jamais bougé depuis. Je travaille souvent avec des DJ. Le sample, les boucles, c’est un son que je trouve assez chaud, une matière que j’adore, bien qu’elle soit un peu compliquée à travailler en tant que musique de film", confie Laurent Teyssier.