Marcela Said a déjà réalisé quatre longs-métrages documentaires, mais L'Eté des poissons volants est son premier film fictionnel, qu'elle réalisa à l'aide de l'expérience acquise sur ses précédents tournages, jouant donc beaucoup de l'improvisation. Il s'agit également de sa première réalisation sélectionnée à un festival aussi prestigieux que la Quinzaine des réalisateurs de Cannes en 2013.
L'Eté des poissons volants, s'il est réalisé par Marcela Said, est également monté par son mari Jean de Certeau, avec qui elle avait auparavant coréalisé deux de ses longs-métrages documentaires, Opus Dei (2006) et El mocito (2011) dont il est justement question qu'il soit distribué en France parallèlement à L'Eté des poissons volants.
L'écriture de L'Eté des poissons volants commença dès 2008, deux ans après que la réalisatrice se soit réinstallée au Chili avec son mari. C'est après avoir été invitée chez des gens dont la situation était proche de celle que vivent les personnages du film que Marcela Said eut l'idée de se pencher sur le conflit sourd qui oppose les indiens Mapuches aux Chiliens modernes. Le fait que le propriétaire des lieux dynamitait son étang pour tenter de se débarrasser des carpes qui l'avaient colonisé a notamment été réutilisé dans l'intrigue du film comme métaphore du conflit entre Indiens et Chiliens.
Les divers sujets qu'aborde L'Eté des poissons volants sont pour le moins violents, mais cette violence n'est volontairement jamais montrée à l'écran. La réalisatrice explique qu'avec Julio Rojas, le coscénariste du film, il avaient décidé de maintenir une certaine retenue dans la violence exprimée. Ce manque d'explicité, cette préférence du sous-entendu valurent à Marcela Said des critiques sur le fait que son film aurait dû mettre en avant sa problématique de façon plus claire et pédagogique. "J’ai refusé de rentrer dans des explications car c’est exactement ici que se joue, selon moi, l’essence du film", répondra-t-elle à ses détracteurs.
Manena, la jeune adolescente que l'on suit d'un bout à l'autre du film, se veut, selon la réalisatrice, le guide du spectateur au travers des multiples événements qui surgissent de L'Eté des poissons volants. Marcela Said voulait un film d'atmosphère, non explicatif, et a cherché pour cela une actrice qui pouvait s'exprimer sans la parole : elle dit être tombée amoureuse du regard de Francisca Walker, très expressif.
"Je ne saurais affirmer que les sensations sont plus importantes que les faits", déclare la cinéaste lors d'une interview à filmdeculte.com qui compare L'Eté des poissons volants à l'approche cinématographique de Jane Campion, dite impressionniste. A Marcela Said de répondre qu'elle s'intéresse surtout à renouveler l'approche d'un cinéma dominant, trop narratif, comme l'avait fait David Lynch il y a plusieurs années.
Tourné uniquement en lumière naturelle, L'Eté des poissons volants demanda un effort particulier à son équipe technique, qui devait constamment être prête à se déplacer pour filmer les scènes de brume, elle aussi naturelle. L'emploi du temps se faisait alors selon les heures brumeuses et les heures lumineuses, pour tourner les scènes voulues.
C'est la bourgeoisie chilienne, qu'elle qualifie de "déconnectée de la réalité", qu'a notamment voulu filmer Marcela Said, parce qu'elle lui paraissait drôle, surréaliste et en même temps significative des tensions et des peurs environnantes que cette classe aisée tente d'ignorer. C'est également pour cela qu'elle décida de faire de son film une fiction et non un documentaire comme ses précédentes réalisations.
Quand Marcela Said montre son film au compositeur Alexander Zekke, L'Eté des poissons volants a déjà une bande musicale très différente de celle finalement existante. Le compositeur en composa une nouvelle en deux semaines, sans du tout se baser sur la première version. Ils optèrent, avec la réalisatrice, pour une musique non illustrative, donnant plutôt une nouvelle dimension à l'oeuvre filmographique par une composition atmosphérique, suspendue et totalement acoustique, jouant majoritairement du violoncelle joué par le compositeur même.