D'une grande beauté plastique, cette œuvre du cinéaste Sono Sion est la première que je découvre, suite à l'étendue de sa réputation jusque dans nos salles françaises (trop tard dirons les amateurs au regard de ce dernier rejetons de sa filmographie ?), suscitant même quelque enthousiasme d'une poignée de critique. Effectivement, The Land of Hope traite d'un sujet pointilleux, le nucléaire, mais d'une manière tout à fait atypique. Avant de parler de nucléaire, parlons de destins. Quatre personnages vont constituer le point de départ de cette aventure lyrique : deux jeunes amants interprétés par des acteurs plutôt bons (quoique un peu hystérique à la japs pour le personnage de Yoichi / quant à la prestation pour Izumi, elle se révèle excellente) et un couple à l'âge de la mûr qui assure les plus belle séquence du film. La photographie apparaît dès le début comme à la fois très lumineuse mais nappée d'un gris qui ternit les couleurs. La radioactivité au milieu de l'amour, ce soleil si habilement filmé qui frappe de ses rayons le petit havre de bonheur coupé du monde dans lequel vivent Chiekho et son mari. Un endroit clos au sein duquel subsiste un amour difficile mais d'une rare sensibilité. Le nuage de désolation ne l'atteint pas, car rien ne les inquiètent tant qu'ils restent "chez eux", formule souvent répété qui ne désigne pas uniquement cet attachement à la terre (montré tel quel au sein de la culture japonaise, assez semblable à de l'enracinement yankee pour s'en donner une idée), mais aussi cet attachement mutuel. Chez eux, c'est aussi à l'intérieur des liens qui les unit, qui leur donne la force de vivre en toute sérénité. Les seules choses qui peuvent leur faire sentir la peur et le soucis sont leurs descendance, les chers êtres qu'ils se dépêchent d'éloigner, de mettre en sécurité, moyen un peu égoïste de vivre dans la paix et l'espérance. Ces derniers subissent alors les mouvements collectifs, finissant par y participer avec ferveur, rongé par la phobie de perdre leur bonheur, réaction située à l'extrême opposé de vieillesse qui ne craint pas de le perdre, qui a appris à accepter la vie dans son entier, et, comme le montre la magnifique séquence ultime, la mort (part indissociable de cet apprentissage). La radioactivité en elle même est relégué au second plan, son utilisation n'a pas de but écologique, c'est un moyen de procéder à une caractérisation poussé du tableau familial universel et idyllique. Et c'est avec une intelligence rare, grâce au pouvoir graphique et sensoriel du cinéma que Sono Sion nous insuffle ses propos. Alors que les films d'actualité politique sont souvent encensés ces derniers temps (la réussite d'Argo et de Zero Dark Thirty aux oscars, la palme d'or pour la Vie d'Adèle...), The Land of Hope réussit magistralement à se faire actuel tout en s'élevant à hauteur d'intemporalité en visant les choses les plus essentielles dans tout ce chaos poétique : la sensibilité humaine vis à vis de la survie.