Un grand merci au Régent de Saint-Gaudens d'avoir programmé ce film, dans le cadre de son Festival 2014 du cinéma Sud-Américain.
"Les Bruits de Récife" ne semble pas avoir bénéficié d'une large diffusion, en dépit d'une avalanche de récompenses dans un grand nombre de festivals.
Kleber Mendonça Filho réalise ici son premier long métrage. Un film à nul autre pareil, à la mise en scène d'une grande intelligence.
Sur la musique de batucada traditionnelle, le film commence sur des images d'archives en noir et blanc qui défilent sur l'écran et marquent, d'emblée l'esprit en rappelant ce que fut la région, à l'époque des plantations. Quelques secondes passent pour se retrouver dans le Récife d'aujourd'hui. Et plus précisément Setúbal, le quartier du réalisateur.
Les bruits des pas qui résonnent, les crissements des pneus de voitures, ou ceux des patins à roulettes, sont omniprésents, et deviennent très vite étouffants et angoissants.
Contrairement aux femmes, hommes et enfants, qui furent misérablement parqués dans les plantations d'hier, ce sont, aujourd'hui, les classes privilégiées qui s'enferment chez eux. Longues barres d'immeubles ultramodernes, dans lesquels des appartements confortables deviennent de véritables forteresses protégées par quantités de grilles, verrous multiples et autres caméras. Kleber Mendonça Filho va nous faire découvrir la vie quotidienne de quelques-uns des membres de cette population aisée, à la gentillesse souvent feinte envers quantités d'employés, pour ne pas dire, serviteurs, fait qui semble exister depuis toujours, comme la méfiance des uns par rapport aux autres. Bien visible dans le passage de cette réunion de copropriétaires au sujet du devenir d'un concierge âgé, présent dans l'immeuble depuis de longues années. Certains sont prêts à le renvoyer aux dires de divers commérages et à la seule vue d'images filmées par un tout jeune gamin. Bien peu sont ceux qui lutteront contre cette décision
La paraonoïa est contagieuse.
Craintes et peurs réunies pour une explosion qui viendra ou pas. Il faudra attendre les dernières secondes du film pour avoir l'explication. C'est là toute la virtuosité du réalisateur qui rend l'atmosphère asphyxiante, de bout en bout.
Un film fort, magnifiquement réalisé qui restera, pour moi, un très grand moment de cinéma.