En un sens, Barbara peut être appréhendé comme un film historique sur les heures sombres de la scission entre les deux Berlin. Pour ce faire, les membres de l'équipe se sont plongés dans le passé et ont enquêté sans relâche, allant même jusqu'à écouter de la musique de l'époque afin de mieux rentrer dans la peau de leur personnage, comme le confie l'actrice Nina Hoss.
Contrairement à la plupart des films, Barbara a été tourné de manière chronologique, chose plutôt rare de nos jours. Selon les acteurs, ce procédé donnait un côté vivant au tournage et les poussait à adopter un jeu plus organique. Seule la scène du baiser entre les deux protagonistes a été tournée en dehors de ce canevas chronologique, comme un instant "hors du temps".
Pour réaliser son film, le cinéaste Christian Petzold ne voulait pas tomber dans le cliché d'une représentation caricaturale d'un Berlin Est gris et morne. Il souhaitait avant tout raconter une histoire d'amour dans un climat difficile. Pour parvenir à un résultat satisfaisant, il s'est inspiré du Port de l'angoisse de Hawks et du Marchand des quatre saisons de Fassbinder. Le réalisateur a également étudié la question de la narration en s'inspirant du procédé opéré par William Friedkin dans French Connection et a visionné des films de Claude Chabrol pour les scènes d'amour.
Les acteurs du film se souviennent d'une scène qui leur a valu un fou-rire mémorable : alors qu'ils devaient examiner les images d'une radiographie, ils se sont soudainement sentis comme des imposteurs, sans comprendre un mot de ce qu'ils disaient, situation qui a entraîné une crise de rire au sein de l'équipe. Finalement, la scène, jugée peu crédible, a été retirée du montage final.
Afin d'être en phase les uns avec les autres, les acteurs avaient recours à une méthode pour le moins improbable : la communication « non verbale » ! Le comédien Ronald Zehrfeld explique le processus en ces termes : "Il s’agit surtout de trouver le ton, l’atmosphère. Soudain, on comprend qu’on touche au but. Il faut juste être au diapason avec son partenaire et vivre la situation, sans chercher à la fabriquer à partir d’une quelconque méthode d’acteur."
Les acteurs et l'ensemble de l'équipe ont jugé qu'il était important pour eux de commencer le tournage avec une idée assez précise et définie des personnages. Cependant, il reste toujours une part d'imprévisibilité dans l'élaboration d'un film, comme le souligne Ronald Zehrfeld : "Cette base de départ nous laissait justement une certaine marge de manœuvre qui nous permettait de nous laisser surprendre au fil du processus créatif", précise-t-il.
Afin de retranscrire l'atmosphère oppressante propre à l'époque de la Guerre Froide, l'équipe a reconstitué un climat de suspicion, de méfiance et de mensonge, comme le souligne l'acteur Ronald Zehrfeld : "Nous avons cherché à recréer la mélancolie qui existait à l’époque, tous ces niveaux de sens qui comprimaient l’espace entre les êtres."
Pour les besoins du tournage, l'équipe a cherché un véritable hôpital du style des années 1980. Christian Petzold se souvient de la découverte des lieux : "Je voulais que l’hôpital du film soit un véritable hôpital, équipé et décoré jusqu’au moindre détail comme dans les années 1980. En le découvrant, nous avons été sidérés de voir à quel point il n’avait rien à voir avec les hôpitaux d’aujourd’hui", se rappelle-t-il, en expliquant ensuite que les acteurs ont tous suivi une formation dans le domaine médical, renforçant ainsi la crédibilité des scènes.
Christian Petzold raconte le déroulement des répétitions : "Quelques semaines avant le début du tournage, nous avons réuni toute la distribution (...) Ensuite, nous sommes très vite entrés dans le détail, en passant en revue les personnages, les lieux, les odeurs et les souvenirs". L'équipe a donc privilégié une entrée en matière rapide et efficace basée sur des critères précis et tangibles. L'aspect humain avait aussi son importance, puisque les membres de l'équipe ont mis en commun leur vécu : "Nous avons évoqué nos souvenirs, nous avons réfléchi et regardé des films", poursuit le cinéaste.