Le réalisateur Jacques-Rémy Girerd avait à l'origine prévu deux acolytes pour accompagner Tante Hilda ! dans ses aventures : ses neveux Tim et Tom. Mais l'idée de faire un film sans enfants fut plus forte et les deux garnements furent relégués au placard. Seulement, le substantif d'Hilda est resté. Tantine est pour tout le monde, au même titre que Monsieur Hulot dans Mon Oncle selon les dires de Girerd.
Jacques-Rémy Girerd voulait proposer une vision du monde réaliste sans pour autant imposer de message à son public : "Nous n'avons donc pas réalisé un film didactique, mais une comédie ! Et s'il n'y a pas de messages assénés, il y a en revanche des situations qui peuvent amener le spectateur à prendre position. Le monde est complexe et je ne me sens pas qualifié pour dire ‘Voilà, ça doit marcher comme cela !’". Il propose alors un conte philosophique où gentils et méchants se complètent pour ramener un certain équilibre. Quant à la morale, libre à chacun de l'interpréter à son gré.
Comme Ernest et Célestine, Tante Hilda ! est un film d'animation entièrement dessiné à la main ! Seules les mises en couleur ont été faites à l'ordinateur. Il a fallu peindre 1320 décors et 137 800 dessins d'animation, construits par 223 artistes, pour que le film puisse prendre vie. Le réalisateur Benoit Chieux a dû dessiner quant à lui près de 10 000 feuilles nécessaires à l'animatique du film.
Le studio Folimage, avec à sa tête Jacques-Rémy Girerd, a rappelé ses talents habituels sur le pont pour réaliser Tante Hilda !. Benoit Chieux était déjà scénariste sur Mia et le migou et passe dès lors au poste de co-réalisateur. Serge Besset a bien évidemment signé la musique du film, comme il l'avait déjà fait avec tous les précédents long-métrages du studio, de La Prophétie des grenouilles à Une vie de chat.
Alors que Folimage est un studio plutôt spécialisé dans les productions de jeunesse, son nouveau film ne possède aucun personnage d'enfant. La raison tient en la volonté de Jacques-Rémy Girerd de proposer un conte qui puisse aussi s'adresser à un public adulte via des personnages auxquels il pourrait s'identifier. Cela n'empêche pas Hilda et Dolorès d'être de grandes enfants mais cette décision permet au film de proposer des personnages qui diffèrent de ce qui se fait habituellement dans la production animée. De plus, Girerd reconnait la difficulté qu'il y a à dessiner des enfants, dont le moindre trait conditionne l'âge et expression.
Si Tante Hilda ! est très largement inspiré de notre monde actuel, ses influences sont bien plus diverses et vastes qu'on ne pourrait le croire. Dolorès tient selon Girerd de la Castafiore de Tintin (qu'on a pu voir depuis peu sur nos écrans). Michaël, le scientifique et timide soupirant d'Hilda, s'inspire de l'acteur qui incarne sa voix, Sergueï Vladimirov, dont les crises bilingues sont calquées sur son personnage. Enfin, le style graphique du film emprunte selon Benoit Chieux aux illustrateurs anglais des années 50-60 chez qui la notion de graphisme est particulièrement forte et se retrouve fortement dans l'univers de Tante Hilda !
Les voix de Ike et Turner, les deux hommes de main de Dolorès, sont interprétées par François Morel et Bruno Lochet, les illustres foutraques des Deschiens (Canal+). Les deux comédiens se sont retrouvés après dix ans de fâcherie autour du micro de Tante Hilda !. Ils ne s’étaient jamais revus. Jacques-Rémy Girerd leur a offert ce moment de réconciliation qui fut chaleureux et attendrissant. Copains comme avant ! Dès les premières répliques, Morel et Lochet ont retrouvé le fluide de leur duo déjanté. Ils contribuent activement à la dimension burlesque du film.
Une bonne synthèse entre la tradition et la modernité. Tous les dessins du film ont été exécutés à la main, à l’ancienne, et remoulinés par les techniques numériques les plus en pointe. Pour corser le travail des dessinateurs, le directeur artistique à imposé à l’équipe d’animation de travailler avec des stylos bille et non des crayons à papier. Avec des stylos, pas d’erreur possible, pas de repentir, le trait doit être juste du premier coup. Cette contrainte qui s’est révélée très jouissive donne une énergie fantastique aux dessins de création. Une trouvaille unique !
Les voix définitives ont été enregistrées au début de la production. Les comédiens sont ainsi plus libres que lors d’une postsynchronisation et le travail de création beaucoup plus riche. L’âme des personnages existe donc dès les premiers instants de la fabrication du film. C’est essentiel ! C’est à partir de ces voix que les animateurs font bouger les dessins en écoutant les dialogues au casque. Ainsi ils font vivre leur personnage au plus près de la sensibilité des comédiens. Cette technique plus onéreuse donne des résultats plus authentiques. Sabine Azéma (la voix de Hilda) a confié que lors de la projection du film elle s’est reconnue en chair et en os, oubliant un temps qu’il s’agissait de dessins !
A la sortie de Mia et le Migou, Jacques-Rémy Girerd avait annoncé que Tante Hilda ! serait son dernier film. Six ans et un film plus tard, il n’a pas changé d’avis. Après une carrière de presque quarante ans en tant que réalisateur, Girerd souhaite désormais se consacrer à aider de jeunes réalisateurs à vivre l’aventure qu’il a connue. Il produit Phantom Boy le prochain film de Gagnol et Felicioli, les réalisateurs d’Une vie de chat (nomination Oscars 2012) et participe activement au développement de trois nouveaux longs métrages d’animation au studio de Folimage.
Tante Hilda ! est sélectionné par le Festival de Berlin dans la catégorie ‘’Generation’’ en compétition officielle. L’équipe a appris la bonne nouvelle peu avant Noël. Un joli cadeau pour le studio Folimage qui ira présenter son film à la Berlinale en février prochain. Berlin est l’un des meilleurs tremplins internationaux en matière de films d’animation.