Guilty of Romance est un film très spécial, évidemment vivement déconseillé aux âmes sensibles, à la fois pour l’aspect franchement craspec, et pour les scènes érotiques très directes.
Pour ma part, je partais sans savoir vraiment dans quoi je me lançais, ne connaissant ni le réalisateur, ni les acteurs, et n’étant pas spécialement sensible au cinéma asiatique de genre. Mais là, c’est plutôt une bonne découverte.
D’abord, point positif, il n’y a pas trop de surjeu des acteurs. Problème que j’estime récurrent dans le cinéma venu d’Asie, ici, en dehors de quelques seconds rôles, pas de souci majeur, et si certains personnages principaux en font des caisses, c’est dans des scènes précises et c’est généralement justifié par le caractère excessif des personnages. Il y a quand même des moments un poil saoulant délivré par Makoto Togashi. Cependant l’héroïne est très convaincante. Megumi Kagurazaka impressionne dans un rôle très complexe, et elle permet vraiment d’oublier les petites errances environnantes, sachant malgré tout que l’interprétation générale est à la hauteur, compte tenu de la difficulté des rôles.
Ensuite, le film dispose d’une esthétique impeccable. La mise en scène est parfaite. La séquence d’ouverture est excellente, et le réalisateur maitrise son sujet. Scènes d’horreur, scènes de sexe, lassitude d’une femme au foyer, lassitude d’un auteur blasé, folie… le réalisateur filme tout avec brio, et c’est la force de ce film élégant, minutieux dans les détails, et techniquement peu critiquable. La photographie est superbe, avec une ambiance des bas-fonds de Tokyo tout à fait remarquable. Les décors sont des plus attrayants et les scènes horrifiques sont d’une horrible beauté ! Pour moi, visuellement c’est sans défaut. La bande son en revanche est un peu lancinante et oubliable. Dommage, même si je comprends l’intention, et le contraste fonctionne d’ailleurs parfois.
Le bémol de Guilty of Romance se situe pour moi au niveau du scénario. Le film se veut « film d’auteur », et j’ai moyennement adhéré à l’aspect métaphorique de l’histoire, mêlant Kafka, inceste et consort. Pour moi, le glissement de l’héroïne, l’exploration du Tokyo interlope, les relations avec son mari, tout cela forme l’aspect le plus appréciable du film. L’imprégnation quasi-mystique des scènes avec Mitsuko m’ont paru parfois d’un symbolisme lourd et pontifiant, qui aurait pu apparaître, pourquoi pas, mais de façon mieux dosée, surtout dans la dernière partie. Soyons honnête, la fin n’est pas tout à fait à la hauteur du début prometteur, surtout qu’on s’y attend assez vite.
A mon avis, Guilty of Romance partait sur de vraies bases scénaristiques, puis a viré à l’exercice de style brillant mais un peu superficiel et désordonné. Peut-être car désireux d’introduire trop de choses et surtout de compenser le crasseux de l’ambiance par une sorte de réflexion élitiste en empruntant à Kafka, le film se disperse et parfois fait ressentir sa durée de presque 2 heures. Reste une actrice principale excellente, un travail formel qui vaut le coup d’œil et il y a tout de même de bonnes choses sur le plan de l’histoire. Si vous êtes prêt à une descente aux enfers vénéneuse et très graphique, le film mérite le détour. 3.5