Après cette expérience de tournage, Sue Bourne confie : "Ce n’est pas l’amour de la danse qui m’a poussé à faire Jig, mais j’ai été incroyablement impressionnée par la danse, les danseurs...". Le documentaire montre de près tout ce qui caractérise cette danse traditionnelle : la complexité et la rapidité des pas, la difficulté de la chorégraphie, la grâce et l’agilité.
"Les dix derniers jours de tournage ont été assez abominables", confie la réalisatrice. Pendant les mondiales, Sue Bourne avait une équipe de vingt personnes, deux équipes de cameramen et cinq caméras HD, qui faisaient des journées de 10 à 15 heures. Elles se levaient tôt le matin pour filmer les danseurs qui se préparaient dans leur chambre d’hôtel puis les suivaient tout au long de leur journée de danse avant de savoir s'ils avaient remporté un prix.
Pour inclure des histoires différentes les unes des autres, Jig a suscité des voyages à Moscou, en Autriche, aux Pays-Bas, à New York, à Chicago et à Détroit. Lorsque le tournage a commencé la première semaine de janvier, il n’a pratiquement pas cessé jusqu’au jour de la finale début avril : "Le programme était éreintant mais il était fantastique de passer d’un pays à l’autre et d’observer la danse irlandaise exécutée dans tous ces lieux différents par tous ces danseurs", assure Sue Bourne.
Sue Bourne voulait restituer la portée mondiale de la danse irlandaise, désormais pratiquée dans des régions aussi inattendues que la Russie, l’Europe, l’Extrême-Orient, ou l’Afrique, en plus des Etats-Unis, de l’Angleterre, et de l’Ecosse : "Nous ne voulions pas faire un film sur les gagnants mais plutôt sur des histoires montrant différents aspects de la vie et de la danse", confie-t-elle.
Le problème majeur et prévisible, dans la réalisation de ce film, était que les instances dirigeantes de la danse irlandaise ne laisseraient pas Sue Bourne filmer. La direction s’opposait en effet à la présence des caméras parce qu’elle craignait le favoritisme à l’égard des danseurs : "Mais le potentiel de ce film était si grand que nous ne pouvions abandonner au premier obstacle", affirme la réalisatrice. Cette dernière a ensuite été convoquée à Dublin pour soumettre sa proposition aux instances dirigeantes d'"An Comissiun" et à ses 80 membres : "Je me suis présentée devant eux et j’ai parlé. Après discussions, le vote nous accordait la permission de faire notre documentaire autour des 40èmes Championnats du monde de Glasgow l’année suivante", conclut-elle.
La productrice-réalisatrice Sue Bourne a créé Wellpark Productions en 2000 afin de développer ses propres films. Depuis, la société a produit plus d'une dizaine de documentaires fortement salués et primés. A travers sa société de production, Sue Bourne s'est consacrée à la production et à la réalisation de documentaires pertinents, stimulants, souvent centrés sur une nouvelle approche de sujets que nous pensions vraiment connaître.
"Je ne connaissais peut-être rien à la danse irlandaise mais je savais reconnaître un bon sujet quand il m’était proposé", affirme la réalisatrice. La cinéaste a, en effet, mis le pied sur un terrain qu'elle ignorait après avoir abordé des sujets tels que la famille, Mum and Me (2008), ou la place de la femme dans la société avec Naked Britain (2004). L'univers de la danse suffisait largement à en faire un documentaire : "C’est un monde fait de larmes, de tensions et de drames, de gagnants et de perdants, de succès et d’échecs", nous dit-elle.
La réalisatrice Sue Bourne ne connaissait pas le concept de la "gigue" jusqu'au jour où Julie Heekin, journaliste indépendante à Glasgow, prenne contact avec elle pour lui proposer un sujet : les 40èmes Championnats du monde de danse irlandaise organisés à Glasgow l’année suivante et ses 6 000 danseurs qui viendraient du monde entier pour remporter 22 titres mondiaux.
La jig ou gigue est une danse traditionnelle irlandaise dont le rythme est très rapide. Ce type de danse s'est principalement étendu aux Etats-Unis et au Canada.