Le réalisateur Hiner Saleem est irakien, mais il est avant tout kurde. Rappelons que le Kurdistan n'est pas un pays mais un territoire et un peuple (dispersés entre Turquie, Iran, Irak et la Syrie, et même en Arménie comme on peut le voir dans Vodka Lemon) qui ainsi tendance à la discrimination. Le sort du peuple kurde est ainsi le sujet de population du réalisateur qui en a fait le sujet principal de la plupart de ses films (Vive la mariée... et la libération du Kurdistan, Passeurs de rêves, Kilomètre zéro, Dol ou la vallée des tambours, Après la chute). C'est encore le cas dans Si tu meurs, je te tue, puisqu'on y suit la confrontation entre un français de souche incarné par Jonathan Zaccaï et une communauté kurde en exil.
Après le drame Les Toits de Paris, Hiner Saleem avait besoin de revenir à un genre qui lui est proche, "la comédie, l'absurde et le burlesque". Ainsi naquit Si tu meurs, je te tue.
"Ce qui m’a excité c’est d’écrire une histoire déstructurée où on ne sait jamais ce qui va se passer et ou les personnages se découvrent au fur et à mesure. C’est comme une poupée russe …" nous apprend le réalisateur de Vodka Lemon. Hiner Saleem voulait aller vers "un scénario où chacun des personnages se passe le relais" : "le film débute par une amitié entre deux hommes et se termine par une jeune femme qui décidera de son destin."
"Pour moi, Siba représente la nouvelle génération de femmes de ces régions qui tente de briser les tabous, de se rebeller sans faire une révolution, elle représente une tendance réformiste lente mais décidée qui veut se libérer. Siba est une jeune fille moderne et libre qui ne se laisse pas intimider. C’est un personnage fort." C'est l'actrice Golshifteh Farahani qui joue ce rôle dans le film. "J’ai rencontré Golshifteh presque un an avant le tournage. Je l’avais déjà vue dans quelques films et je sentais un grand potentiel chez elle". Il semblerait que le réalisateur ne se soit pas trompé : "Une relation de confiance mutuelle s’est tout de suite établie. Elle m’a vraiment surpris sur le tournage, c’est une actrice extrêmement talentueuse et très généreuse. Elle a amené au personnage de Siba exactement ce que je recherchais, un mélange de tradition et de modernité."
Jonathan Zaccaï et Golshifteh Farahani ont la particularité d'avoir tous deux joué avec le réalisateur anglais (mais tournant aux Etats-Unis) Ridley Scott. En effet, Jonathan Zaccaï faisait face à Russell Crowe en Philippe Auguste dans Robin des Bois en 2009 alors que Golshifteh Farahani donnait la réplique à Leonardo DiCaprio dans Mensonges d'Etat.
Son rôle dans le film Mensonges d'Etat de Ridley Scott n'ayant pas été apprécié par les autorités iraniennes, son pays d'origine, l'actrice Golshifteh Farahani a reçu en août 2008 une interdiction temporaire de sortir du territoire. Ayant eu au sein de cette interdiction une autorisation de sortie de vingt quatre heures, l'actrice en profite pour quitter le pays et ses mesures répressives. Elle est donc aujourd'hui forcée à l'exil, séparée des siens
Hiner Saleem qui a tourné en Arménie (Vodka Lemon), en Turquie (Dol ou la vallée des tambours), en Allemagne (Après la chute) et même en Irak! (Kilomètre zéro) retrouve avec Si tu meurs, je te tue le décor parisien pour la troisième fois. Le réalisateur avait déjà tourné dans la capitale française son premier long-métrage Vive la mariée... et la libération du Kurdistan, où déjà il suivait l'itinéraire d'un réfugié kurde et le mélancolique Les Toits de Paris avec Michel Piccoli en 2007. Hiner Saleem vit lui-même à Paris depuis maintenant près de vingt ans.
Cheto, le patriarche kurde, est incarné par l'acteur turc Menderes Samancilar. "Cette expérience pour lui a été très forte nous apprend Hiner Saleem, il devait jouer le rôle d’un père et surtout parler le kurde la langue de sa mère qu’il ne connaissait pas et qui est interdite dans son pays. Il a dû apprendre phonétiquement le kurde et mon assistant lui traduisait mes instructions du kurde en turc. Après tant années, ce magnifique acteur a retrouvé avec une grande émotion sa culture kurde."
"Ce personnage représente la dernière génération de kurde attaché à la tradition. C’est un personnage ambivalent. Pour lui l’homme est le tuteur de la femme. Cheto sait, au plus profond de lui, que Siba est libre. Il pourrait même l’accepter, mais vis-à-vis de la communauté, il réagit différemment pour sauver ce qu’il appelle l’honneur."
Pour jouer le rôles des sept frères kurdes, Hiner Saleem a mêlé comédiens professionnels et non-professionnels. Ils sont un "un condensé de la diaspora kurde". Ainsi certains des acteurs travaillent dans le bâtiment et sont les frères et cousins d’un ami du réalisateur. Hiner Saleem confie s'en être inspiré pour le personnage de Mihyedin.
Mihyedin est interprété par Özz Nüjen, un comique très connu en Suède.
Mamat, un des frères dans le film, est interprété par Nazmi Kırık, un Kurde de Turquie qui vit en Allemagne. C’est lui déjà qui jouait le rôle de Kilomètre zéro.
Le titre "Si tu meurs, je te tue" a été utilisé par le dramaturge et écrivain Philippe Sohier pour un de ses romans paru en 2009.