Qui a envie d'être aimé ? est le 1er long-métrage d'Anne Giafferi. Celle-ci travaille comme scénariste depuis quinze ans pour la télévision. En 2006, elle crée avec Thierry Bizot, la série Fais pas ci, fais pas ça diffusée sur France 2, dont elle a réalisé deux épisodes.
Anne Giafferi explique son film :"C’est un film qui joue avec les clichés ou les préjugés dont l’Eglise Catholique est souvent l’objet. On s’y moque gentiment des croyants mais aussi de ceux qui ont des préjugés par rapport à la religion. (...) Certes le film parle de spiritualité, de quête, de recherche de sens, mais ces sujets sont traités avec légèreté, ironie et sans prosélytisme. J’ai cherché l’équilibre entre un sujet assez sérieux et un genre tendant plus volontiers vers la comédie."
Le film est l'adaptation du roman Catholique anonyme (2008) de Thierry Bizot, dans lequel ce dernier fait son coming-out spirituel dans le monde des médias.
Compagne de Thierry Bizot, la réalisatrice Anne Giafferi adapte non seulement le roman de son mari mais aussi sa propre histoire. Thierry Bizot la résume ainsi : "Pour faire simple, c’est comme si j’avais vécu une relation amoureuse… avec Jésus. Dans le film, cette relation peut être assimilée à une relation extraconjugale parce que le personnage ressent de l’amour pour Jésus, qu’il le cache et que sa femme vit cette relation inédite comme un adultère." Anne ajoute :"(...) Jour après jour, j’ai vu des livres sur Jésus s’amonceler sur sa table de nuit… J’ai eu peur que tout cela prenne trop d’importance, que Thierry devienne une sorte « d’illuminé »."
Anne Giafferi explique l'origine du titre : "Dans cette histoire, comme dans la vie en général, chacun est en quête d’amour. Antoine a besoin d’être aimé par son père, son fils Arthur aussi, sa sœur cherche l’amour d’un homme, son frère cherche la reconnaissance, sa femme a peur qu’Antoine ne l’aime plus… Comme les personnages du film, nous avons tous, petits et grands, cet insatiable besoin d’amour et malheureusement, nous avons tous le sentiment à un moment ou l’autre de notre vie, de ne pas être assez aimé. Dieu peut être une réponse à ce besoin d’amour. C’est d’ailleurs la première question que pose le prêtre lors de la catéchèse : « Qui parmi vous a envie d’être aimé ? ». Tout le monde lève la main… évidemment."
La réalisatrice revient sur le choix de ses comédiens : "Pour le personnage d’Antoine, Eric Caravaca, s’est imposé. Il a le charme, le bouillonnement intérieur maîtrisé et la grande tempérance nécessaires au personnage. Le film se construit à travers son regard et suivant sa propre évolution. Valérie Bonneton, qui joue le rôle de la soeur, a ce petit côté Woody Allen que j’aime depuis longtemps... (...) Arly Jover, qui joue le rôle de la femme mêle douceur et élégance. Son visage de madone illumine le film. Pour incarner le père et le frère d’Antoine, je voulais des hommes imposants par leur physique et par leur personnalité. Jean-Luc Bideau, par sa stature, sa voix et son regard, impressionne d’emblée. Quant à Benjamin Biolay, c’est le « bad boy » idéal. Il a une désinvolture et une présence qu’on trouve chez peu d’acteurs. Quand il arrive dans une pièce, lentement, sans en avoir l’air, il pose son regard plus qu’il ne regarde, il murmure plus qu’il ne parle, et pourtant il dégage une énergie incroyable. Il entre et il est là. Le jeune comédien qui incarne le fils d’Antoine me touche particulièrement. Son petit corps frêle évoque les derniers moments de l’enfance mais son comportement exprime l’envie pudique et désespérée d’être aimé…"
Bien que narrant la rencontre d'un homme avec Dieu, Qui a envie d'être aimé ? n'est pas pour autant, selon sa réalisatrice, un film mystique : "Je n’ai pas suivi le même parcours que Thierry et je reste assez distante par rapport à la foi et la religion. C’est pourquoi j’ai souhaité qu’à aucun moment le spectateur n’ait l’impression qu’on lui dise : « si vous croyez en Dieu, ça ira mieux pour vous. ». Ce qui m’intéressait, c’était de montrer pourquoi et comment quelqu’un de «normal», sous-entendu équilibré et peu vulnérable, peut être - malgré lui - touché par la foi."
Bien qu'il soit au centre de l'intrigue, Dieu est au final très discret dans le film, représenté par le biais d’une statue de Jésus non crucifié. "Je voulais que la représentation du Christ soit la plus humaine, la plus accessible possible. Nous avons trouvé cette statue du XIVème siècle, un Christ aux liens, qui frappe par la douceur et l’humanité de son regard. Je voulais qu’on puisse imaginer le dialogue et la proximité avec le héros. Une relation d’homme à homme. Quand Antoine le voit, on comprend qu’il se passe quelque chose entre eux deux. La mise en scène devait s’effacer au profit de cette rencontre, qui sur papier, pouvait sembler « casse-gueule » ! Avec mon chef opérateur, nous avons décidé de travailler très simplement, en champs/contre-champs, comme on l’aurait fait pour un dialogue, en évitant soigneusement les artifices ou les effets", explique la réalisatrice.