Un baiser papillon : les secrets du tournage

Un baiser papillon est la première réalisation de Karine Silla. Cette envie est née de sa passion pour les acteurs : "Ce film a été écrit pour eux. Je voulais filmer des êtres humains que j’aime et que j’admire. Un échange et une proximité qui me sont chers." Auparavant, on a pu voir Karine Silla comme comédienne dans Il est plus facile pour un chameau... et Je vais te manquer. Elle a également été scénariste de Peau d'ange, premier long métrage de son compagnon Vincent Perez.

Karine Silla explique : "Je voulais faire un film sur les gens qui m’entourent. Raconter une histoire en chair et en os, qui parle de la vie, la vraie. Celle de tout le monde, de tous les jours. Les personnages, l’histoire sont arrivés très vite. Ils étaient déjà là, à mes côtés, inspirés du vécu. Le mien, celui des proches."

Karine Silla est obsédée par le secret et ses répercussions : "Tous ces personnnages, quelque soit leur génération, ont un secret qu’ils n’osent dévoiler, par peur de froisser l’être aimé. Révélé au grand jour, celui-ci va faire basculer leur existence. A quel moment un secret qui nous appartenait seul appartient-il aussi aux autres ?" La réalisatrice met également en scène la colère, que ce soit celle des émeutes, celle d'une personne en deuil ou n'arrivant pas à avoir d'enfant.

Karine Silla n'a pas fait passer d'essais aux acteurs de son film, préférant suivre son instinct : "Je voulais des êtres vivants, vrais, capables de passer en une seule prise d’une émotion à une autre. (...) Les acteurs ont fait ce film par amour, dans la confiance, avec le meilleur d’eux-mêmes."

Dans Un baiser papillon, Karine Silla dirige ses deux filles, Roxane Depardieu et Iman Perez ("sans qui je n’aurais pas imaginé tourner", confie-t-elle), ainsi que son époux Vincent Perez. L'acteur a d'ailleurs particulièrement apprécié le tournage : "Le rôle de Louis a été écrit sur mesure, avec ce que je suis. C’est étrange d’être si proche de son personnage. Bouleversant même, car tout ce qu’il véhicule vient de mon terroir, de ma famille : ses filles, jouées par les miennes ; le regard de ma femme, Karine, qui me dirigeait. Et cette impression troublante de me voir vivre. (...) il y a eu cet échange merveilleux avec mes filles. Comme mon personnage, cette aventure m’a transformé."

Karine Silla a accordé beaucoup d'importance à l'univers visuel du film et a tenu à rattacher une couleur à chaque personnage afin de mieux les caractériser : "Rouge pour Marie, l’amoureuse passionnée ; bleu pour Alice, l’infirmière, limpide, instantanée ; jaune pour Billie, sa chaleur maternelle ; noir et rouge pour Paul et Natalya, les néons de Pigalle, la nuit, celle d’un homme, sans enfant, qui a « enlevé les couleurs à la vie »", explique-t-elle.

Angelo Badalamenti signe la musique d'Un baiser papillon. Ce compositeur américain est un fidèle collaborateur de David Lynch. Ensemble, ils ont notamment travaillé sur Blue Velvet, le film Twin Peaks ainsi que la série, Sailor et Lula ou encore Mulholland Drive. Il a également composé les musiques de La Cité des Enfants Perdus et Un Long Dimanche De Fiancailles de Jean-Pierre Jeunet.

Ancienne danseuse, Karine Silla a tenu à intégrer des chorégraphies dans le film : "Je voulais que chaque personnage ait une chorégraphie : Billie et Louis dans la chambre, Paul et Natalya quand ils marchent dans la rue, Fleur en petit rat d’opéra, Samuel en chef d’orchestre…" Plus généralement, l'art tient une grande place dans le film : "Ecriture, peinture, danse, musique, théâtre, cinéma : l’art touche nombre de mes personnages, c’est un dialogue en continu avec le film", explique-t-elle.

Cécile de France joue une infirmière qui, malgré les tracas du quotidien, prend la vie à bras-le-corps : "Ce personnage m’a immédiatement touché : tout ce qu’il raconte sur les angoisses de l’être humain, la peur de la mort, de la vie, cette quête vitale de liberté. Ca peut paraître banal, mais c’est essentiel."

Edith Scob incarne la mère de Vincent Perez et Jalil Lespert qui cache un lourd secret. La comédienne a apprécié la dimension transgénérationnelle du film : "En tant que grand-mère, l’importance du rôle des enfants et le thème de la transmission me touchent tout particulièrement. La mère représente l’arbre, les racines."

Paul est selon Jalil Lespert "un être à fleur de peau, sensible, blessé". Il ajoute : "Je trouvais sa relation avec Natalya très jolie, pudique, touchante. Cet amour impossible où la seule chose finalement possible est l’essentiel : aider l’autre, être là pour lui, sans rien attendre en retour."

Nicolas Giraud prête ses traits à Samuel, un chef d'orchestre en couple avec Marie. L'acteur revient sur sa méthode de travail : "J’ai commencé par apprendre la gestuelle avec un jeune chef d’orchestre, mais je m’en suis vite détaché. Copier ne m’intéresse pas, il fallait que la musique jaillisse de moi. Un chef d’orchestre doit avoir sa propre couleur. J’ai répété seul, isolé, jusqu’à trouver la mienne. Paradoxalement, je travaille toujours ainsi, de façon à la fois très réfléchie et spontanée, physique."

Elsa Zylberstein interprète Marie, une actrice reconnue qui veut à tout prix un enfant. Ce rôle lui donne l'opportunité de jouer une comédienne pour la première fois : "Il y avait comme des fils invisibles entre Marie et moi. J’aime ce personnage haut en couleur, ses excès, sa détresse. Elle prend la vie avec la violence de la passion. Une artiste qui vibre."

Valeria Golino incarne Billie, une femme qui a tout pour être heureuse jusqu'à l'irruption de la maladie dans sa vie : "Billie est un très beau rôle. Celui d’une femme pudique, vitale, qui traite les autres et la vie avec une grande délicatesse." Un rôle fort qui a marqué l'actrice : "Ce rôle était intense, difficile. Tout est intériorisé : la peur, la douleur, la solitude, la crainte que la maladie devienne plus importante que la femme qu’elle est. Après le tournage, sa pudeur a continué à m’habiter pendant deux mois."