En 2007, le jeune réalisateur canadien Jason Eisener s'était vu remporté le concours de fausse bande-annonce organisé par la firme « Grindhouse » (Robert Rodriguez – Quentin Tarantino) avec le trailer d'un film fictif nommé « Hobo with a shotgun », mettant en scène un sans-abri désabusé et un peu secoué qui se mettait martel en tête de faire le ménage dans une ville en proie à une violence sans limite à grand coup de fusil à pompe... Résultat, sa bande-annonce avait été projeté dans les salles américaines et canadiennes avant la diffusion du diptyque « Planet Terror - Boulevard de la mort ». Joli cadeau. Et, à l'instar de « Machete », elle avait suscitée un tel engouement que la voici commuée, trois ans plus tard, en un long-métrage, le tout premier de la carrière de Eisener.
Ce-dernier reprend donc les bases, saynètes clés et répliques chocs de sa courte recette, et confie cette fois le rôle-titre non plus à un anonyme mais à Rutger Hauer (« Hitcher », « Blade runner », « The osterman weekend », …), excellent en clochard vengeur, comme habité par une mission divine, qui débarque par hasard dans une petite ville où un père et ses deux fils font régner la terreur et le chaos. A partir de là, le scénario n'est plus qu'un vulgaire prétexte à une succession de scènes gores en tout genre, les litres d'hémoglobines jaillissent des têtes coupées tels le pétrole d'un geyser, et les massacres et sévices feraient pâlir un GI américain ayant servi en Irak. Eisener empile alors les séquences de morts brutales d'une manière un peu excessive par moment, avec un léger manque de maîtrise proche de la confusion, ce qui devrait vite en lasser plus d'un, mais au moins, il s'est creusé la tête pour styliser la mise à mort de ses protagonistes les plus malchanceux. Si son film tombe rapidement dans la surenchère de violence gratuite et débile, ce n'est jamais pour se la jouer dérangeant avec un côté provoc' à deux balles, et on sent bien que le jeune cinéaste n'est pas du genre à se prendre la tête et à se la péter prétentieux en glissant uniquement des références déguisées. Le tout est servi avec un humour potache et un esprit au centième degré. Ne reculant devant aucun interdit et aucune concession formatée, il se permet absolument tout, même quelques instants d'émotions et d'espoir contrastant vivement avec le nihilisme et l'horreur omniprésents.
C'est jubilatoire, trash à souhait, ça part dans tous les sens sans la moindre seconde de répit, et la bande-son 80's à de la gueule. N'empêche que le script est excessivement pauvre, voire caricatural, que les interprétations, hormis celles de Hauer et de Brian Downey (le grand méchant fou) sont plutôt médiocres, voire affligeantes, et que la photographie est exécrable à souhait, voire désastreuse (et ce n'est pas parce qu'on porte l'étiquette Grindhouse que l'on peut tout se permettre à ce niveau là).
Certes « Hobo with a shotgun » peut être qualifié de petit OVNI, le genre de films à ne pas mettre entre toutes les mains et qui se distingue par son côté anticonformiste, complètement décalé, fou et déjanté, mais il n'est finalement rien de plus qu'une série Z ultra-sanglante, un nouvel hommage très appuyé aux nanars des années 80 et au cinéma bis ayant peuplé la jeunesse de beaucoup de cinéphiles, chose qui est autant à la mode ces-derniers temps que l'écologie. En tout cas, difficile d'y rester insensible, beaucoup le détesteront, d'autres l'apprécieront, certains y verront une daube ultime, certains un chef-d’œuvre inclassable. Mais il faudrait être aussi barré que ce film pour choisir la dernière option...
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