Jérémie Renier, acteur à la carrure peu imposante, a décidé de prendre du poids pour mieux coller à son personnage dans Possessions. Le réalisateur revient sur la décision du comédien en racontant : "C’est lui qui en a eu l’idée, il a eu envie de prendre du poids pour incarner ce personnage lourd, pour peser dans le récit, envie de se transformer, d’être quelqu’un d’autre". Au total, Jérémie Renier a pris dix-huit kilos !
Le cinéaste déclare affectionner le genre du conte pour enfant, auquel il a emprunté de nombreux éléments pour construire son récit : "Il y a en effet la forêt, le village, les enfants, le meurtre, un ogre, la rumeur, le feu : des éléments que je n’ai pas inventés". En réalité, Eric Guirado trouvait qu'il existait une étonnante correspondance entre le côté sombre du fait divers en question et l'aspect parfois lugubre de certains contes : "Cela m’a troublé que cette histoire rejoigne la cruauté des contes où quelqu’un a souvent mission de venger quelqu’un d’autre, comme la reine qui envoie un chasseur pour ramener un cœur… J’ai voulu que cette poésie noire soit présente à l’image", explique-t-il.
Dans Possessions, il est question de surendettement, sujet qui inspire beaucoup le septième art en ces temps de crise. Après Toutes nos envies de Philippe Lioret et Une vie meilleure de Cédric Kahn, c'est au tour d'Eric Guirado de dénoncer ce fléau des temps modernes.
Les personnages du film, chacun à leur façon, poursuivent une quête éperdue de bonheur. Tandis que les uns espèrent le trouver dans un chalet en montagne, pour y recommencer une nouvelle vie, les autres savourent leur réussite sociale en adoptant une conduite ostentatoire : ceux qui étaient pauvres se targuent ainsi d'avoir pris leur revanche et voient en leur confort matériel l'une des clés du bonheur.
Possessions est un film qui se fait le reflet de la société de convoitise dans laquelle nous vivons, où les fossés entre les riches et les pauvres, de plus en plus visibles, causent des dégâts considérables et éveillent chez les gens des penchants répréhensibles tels que l'envie, la jalousie voire même la haine. Dénoncer la société de consommation qui nous pousse à voir par le prisme de ce que l'on possède, tel est le but d'Eric Guirado avec ce film.
Le cinéaste Eric Guirado, soucieux de rester impartial, précise qu'il s'est situé à la croisée des deux camps pour réaliser son film qui, au-delà du simple fait divers, est une chronique contemporaine à visée cathartique.
Eric Guirado se revendique d'une approche privilégiant la psychologie des personnages au détriment de la reconstitution. Pour lui, il ne s'agissait pas de faire un documentaire, mais un film de fiction dont le thème central, la jalousie, serait illustré par des faits réels. Le réalisateur a avant tout voulu répondre à la question qu'il s'est lui-même posée : "Comment peut-on en arriver là ?". A travers son film, il propose donc un cheminement psychologique susceptible d'expliquer de tels actes.
Comme le reconnait Eric Guirado, la fuite est l'un de ses thèmes de prédilection, puisqu'il a déjà abordé une telle problématique dans Quand tu descendras du ciel et Le Fils de l'épicier. Partir pour trouver un endroit meilleur et recommencer une vie... Mais, si selon l'adage, "l'herbe est toujours plus verte ailleurs", qu'en est-il vraiment ? Le réalisateur avoue : "Chaque fois, mes personnages trouvent autre chose que ce qu’ils souhaitaient trouver. Dans Possessions, ils foncent droit vers la tragédie."
Sur l'affiche du film Possessions, on peut lire l'accroche suivante : "Tu ne convoiteras point". Cette phrase fait référence à l'un des Dix Commandements, qui stipule : "Tu ne convoiteras point la maison de ton prochain ; tu ne convoiteras point la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni aucune chose qui appartienne à ton prochain". De plus, l'allusion à l'Envie, qui est l'un des Sept Péchés Capitaux, est évidente, puisque le péché se définit ainsi : "La tristesse ressentie face à la possession par autrui d'un bien, et la volonté de se l'approprier par tout moyen et à tout prix". Eric Guirado s'est donc inspiré de textes religieux fondateurs pour concevoir le message de son film.
Etonné par la jalousie et la méchanceté dont le prévenu a fait preuve à l'égard de ses victimes lors d'une interview, le réalisateur de Possessions a trouvé qu'il serait intéressant de faire un film sur la complexité des sentiments humains : "J’ai à cœur d’explorer les différentes facettes de la nature humaine, des sentiments universels et intemporels, et là, j’avais la possibilité d’en étudier un versant sombre, les rouages de la convoitise, l’engrenage de l’envie", explique Eric Guirado.
Le metteur en scène Eric Guirado s'est senti concerné par ce drame survenu dans sa région natale : "Je suis né en Haute Savoie, et j'ai grandi dans un village de montagne, tout près de l’endroit où s’est déroulé ce drame. Lorsqu’un fait divers médiatisé survient non loin du pays où vous avez passé votre enfance, vous y êtes d’autant plus sensible", confesse-t-il.
Le fait divers, communément appelé "L’affaire Flactif" ou "La Tuerie du Grand Bornand", a inspiré de nombreux auteurs. Deux livres et trois documentaires ont été consacrés à l'"évènement". Aujourd'hui transposé au cinéma, c'est Eric Guirado, le réalisateur du Fils de l'épicier, qui se charge de l'adaptation des faits sur grand écran.
Possessions est inspiré d'un fait divers ayant défrayé la chronique en 2003. Basé sur une histoire criminelle survenue dans la région d'Annecy, le film relate la disparition et le meurtre d'un promoteur immobilier, de sa femme et de leurs trois enfants.