Il était une fois, dans un royaume lointain de sable et de dunes, deux rois qui se firent la guerre pour un bout de territoire. Vaincu, le sage et droit Amar doit laisser à son rival retors et ambitieux ses deux fils. Le jour où une compagnie texane découvre du pétrole dans le sous-sol de ladite bande de territoire, la guerre va reprendre et les fils doivent choisir leur camp.
Le désert, la filiation, la guerre, le choc des cultures, le tout au début du siècle dans la péninsule arabique, cet Or Noir se réclame délibérément de Lawrence d’Arabie. Malheureusement, Jean-Jacques Annaud semble plutôt pencher du côté des contes des mille une nuits, quand ce n’est pas directement de Walt Disney. Sinon, comment expliquer ce scénario d’une telle naïveté, quand ce n'est pas d'une bêtise renversante ? Construit sur la base de coups de théâtre simplistes (le méchant qui surgit derrière un rocher, c’est juste pas possible), de vaillants princes et de belles princesses, le film renvoie à une simplicité d’un autre âge.
Il est déjà assez amusant que tout le monde parle anglais couramment (y compris les nomades sauvages du désert), il faut en plus supporter le jeu surréaliste d’Antonio Banderas, à la voix rauque et aux haussements de sourcils démultipliés, qui s'est manifestement cru dans un épisode des Soprano. On ne parle même pas de la partition très envahissante de James Horner, qui balance force violons et orgues à chaque événement marquant, ou à chaque vue du désert. Impossible de prendre au sérieux un film bâti pourtant sur des thèmes actuels et qui ne prêtent pas forcément à sourire (rapport entre religion et argent, pétrole, progrès…), mais traités avec une finesse sociologique digne de Tintin au Pays de l’Or Noir…
Pourtant, lorsque le héros sort des murs de sa ville pour entamer une quête dans le désert, il se passe enfin quelque chose. Entre la métamorphose d’un homme, les paysages grandioses et la construction progressive d’une unité, on parvient enfin à s’intégrer à cette histoire, à ne plus la regarder avec distance et mépris, bien aidés par les très convaincants Tahar Rahim (Un Prophète) et Mark Strong (Kick-Ass). Du livre d’images pour enfants, le film se hisse petit à petit au niveau d’un divertissement de qualité, jusqu’à de belles batailles en plein désert pendant lesquelles on sent presque le souffle épique que l’on était venus chercher.
Las, Jean-Jacques Annaud se fourvoie dès le retour au bercail avec un épilogue pompeux à souhait qui replonge dans le ridicule un film et dont le charme suranné avait presque fini par convaincre. Qu’un réalisateur aussi expérimenté manque à ce point de recul sur son travail est tout bonnement incroyable. A défaut de Lawrence d’Arabie, on devra donc se contenter d’un curieux spectacle, sorte de film coincé entre le pastiche et l’hommage. Qui ferait plus l’affaire d’un musée que d’un exploitant de salles (qui risquent de se retrouver vides très rapidement dans le contexte actuel). Mais enfin, c’est toujours de l’argent que le Qatar (producteur) ne mettra pas dans le PSG…
http://dh84.over-blog.com/