Coup d'éclat a été tourné à Sète et à la Seyne-sur-Mer. Le réalisateur a souhaité y reconstituer une ville portuaire à taille humaine : "Cette dimension réduite - petite ville, petit effectif policier - était importante pour le personnage de Fabienne et dans l’intérêt qu’elle porte un jour à Olga (...) : si elle avait chaque jour à gérer une masse de gens importante, elle ne se serait pas souciée de cette fille et serait rentrée chez elle après sa journée de travail." L'équipe du film a construit le commissariat dans d'anciens locaux des Renseignements Généraux. Ce décor paraissait si réel que des policiers y sont venus pour reconduire un homme à la frontière ! Et si le commissariat se trouve au bord de l'eau, ce n'est pas un hasard : "j’aime le fait qu’il soit comme acculé : même si le paysage est très ouvert, on ne peut pas aller plus loin. Le personnage aussi atteint un cul-de-sac, une butée. Il faut un déclic pour renouveler son regard sur les autres. Son humanité renaît de ses cendres."
L'une des particularités de Coup d'éclat est de nous faire traverser des lieux qui sont soit en chantier, soit en ruines. Le réalisateur présente ces lieux comme "des endroits à la périphérie, des No man’s land où quelque chose est en devenir, embryonnaire". Tout comme l'environnement, le personnage principal est lui aussi "en chantier" : "Au début, Fabienne fait partie à son niveau des gens qui 'gèrent' le monde, via les reconduites à la frontière, mais de plus en plus, elle se décale, jusqu’à décider d’enfreindre les règles que lui impose sa profession."
José Alcala prend plaisir à jouer avec les attentes du public et évite de trop en dévoiler sur ses personnages : "Les histoires les plus intéressantes au cinéma sont souvent celles que l’on donne à voir. De Fabienne, je ne montre donc que son présent - c’est-à-dire aussi son aigreur, la sécheresse cassante dont elle fait preuve avec Cédric, son subordonné consciencieux. (...) On suppose aussi, quand elle dit à Kacem : 'Il faut bien que quelqu’un fasse le sale boulot', qu’elle a dû faire de son métier un sacerdoce, en réaction à sa mère, réfractaire à l’autorité via un engagement politique frontal."
Le personnage de Carole peut être vu comme un double en creux de Fabienne car elles partagent toutes les deux "une même dureté, un mutisme" explique le réalisateur.
Au-delà d'être un drame, Coup d'éclat est également un polar : "Ce qui m’intéresse, c’est la violence sociale, pas la violence de cinéma où tout se règle d’un coup de pistolet qui empêche de raconter quelque chose de plus puissant. Mais les codes visuels du polar (la noirceur, en particulier) m’ont permis d’éviter tout 'message' (...). J’ai besoin d’émotion pour accepter que du sens passe, c’est pour cela que j’aime rester dans le champ de vision restreint des personnages, tout en faisant un gros travail sur le son pour construire un vrai hors-champ (...)" , confie le réalisateur.
Pour mettre en scène des marginaux, José Alcala est allé à la rencontre de personnes qui ont le même mode de vie : "j’ai beaucoup traîné dans les bars de ports, et surtout dans les campings, chez les gens qui y vivent à l’année. Ce sont des gens - souvent des retraités - un peu en rupture de banc mais qui ont une science de la vie à vous couper le souffle. Tout comme ces travailleurs immigrés que j’ai rencontrés dans des foyers et qui m’ont donné envie d’aborder le personnage de Kacem. (...) Je me fie toujours à la réalité pour raconter des histoires."
La comédienne a désiré jouer dans Coup d'éclat car "c’est l’histoire d’une solitude et d’un combat". Elle était surtout intéressée par "l’évolution du personnage (...), sa transformation, son ouverture progressive à des émotions qu’elle avait mises de côté, enfermées." José Alcala revient sur ce qui l'a poussé à choisir Catherine Frot : "J’aimais que Fabienne, cette flic bancale différente des héroïnes des séries policières qui manquent souvent d’âpreté, soit incarnée par une comédienne populaire, que les gens viennent voir au cinéma. Catherine Frot a une truculence qu’elle a glissée dans ma vision du film, tout en étant extrêmement bosseuse, prête à tout."
Plutôt habituée aux comédies, Coup d'éclat permet à Catherine Frot de s'illustrer dans un rôle plus dur : "J’aime tout autant jouer les femmes irréelles, drôles et touchantes appartenant au divertissement, que celles plus rudes, plus combatives, issues d’un cinéma dit réaliste. (...) Au départ, Fabienne est une femme-flic dure, fatiguée, fermée. Elle ne fait aucun effort d’attention envers personne, sauf peut-être envers sa mère, qui vit chez elle. En tant que flic, elle assume de faire le sale boulot, comme elle dit, c’est-à-dire surtout des reconduites à la frontière (...)."
Catherine Frot incarne une femme qui peu à peu se révolte : "Elle passe de l’autre côté du miroir. Il y a, par petites touches, des prémices à ce changement : la lassitude de la routine policière, le paradoxe d’être flic quand on a eu des parents communistes, et puis la mort de sa mère. Petit à petit, elle désobéit à sa hiérarchie, elle partage avec Kacem, maghrébin et ouvrier, une situation d’urgence, et au bout du compte, elle finira par abriter chez elle une femme dans l’illégalité et un enfant sans papiers. C’est plus fort qu’elle : elle entre en résistance."
Catherine Frot revient sur la manière dont elle est entrée dans son personnage : "J’étais guidée par l’idée que cette femme devient une autre à travers un geste d’humanité qu’elle n’avait pas prévu. Peu à peu, elle ressent de l’empathie pour les gens qu’elle rencontre au camping et qui vivent dans ces caravanes, pour les ouvriers qui démontent l’usine délocalisée."
Marie Raynal, l'interprète de Carole, a déjà tourné sous la direction de José Alcala. Elle a en effet joué dans son premier film, Alex, ainsi que dans certains de ses courts-métrages (La Visite, Les Gagne-Petits, Frigo). Elle a également joué dans Pauvre de moi, court-métrage d'Olivier Gorce, le scénariste de Coup d'éclat.