Beau film d'une sensibilité certaine, et sans prétention aucune, ça donne un bel objet. Le quotidien du salon de beauté est prétexte pour faire défiler une galerie de personnages tous plus pittoresques les uns que les autres. Ils tournent tous autour de la personne de Angèle, femme mûre, déçu par les hommes et la vie, cynique et parfois cruelle, mais toujours intéressante. On est dans un espace fictif, le réalisme laisse place à l'expression de sentiments, désirs non assouvis, passions passagères. Le final presque onirique, confirme l'espace du rêve, et le jeu très naturel, de Nathale Baye sert de liant, et donne beaucoup de poids au film. La sonnerie intempestive de la porte d'entrée, sonne comme un superbe gag à la "Monsieur Hulot", et les dialogues sont appétissants à souhait. C'est divertissant et pas con. Les nombreux seconds rôles annexes sont très typiques, comme cette femme exhibitionniste qui passe régulièrement, ou bien cet homme d'âge mûr qui drague cette petite esthéticienne visiblement trop jeune pour lui. Lieu artificiel, ce salon, théâtre ou confessionnal, qui ne rend pas beau, comme on pourrait si attendre, mais fait remonter les défauts ou le grotesque à la surface. Cela pourrait expliquer la remarque d'une des filles à sa patrone, avant de donner congé: " Je vous trouve complètement bidon, vous n'êtes qu'une commerçante".
Certains plans sont curieusement tronqués comme la scène finale, qui peut paraître illogique mais qui souligne bien le fait qu'on est dans un espace surréel. La sobriété de la mise en scène est pour beaucoup, elle installe une ambiance, une légèreté feinte qui rend très bien le banal du quotidien des filles. Bon film à voir.