The Irishman : les secrets du tournage

The Irishman de Martin Scorsese marque la neuvième collaboration entre le célèbre réalisateur et Robert De Niro, après Mean Streets, Taxi Driver, Les Affranchis ou encore Casino. Une collaboration qui a encore de beaux jours devant elle, puisque l’acteur jouera de nouveau sous la direction de Scorsese pour son prochain film Killers of the Flower Moon prévu pour 2021.

Il aura fallu 12 ans à The Irishman pour voir le jour. En 2007, Robert De Niro découvre J'ai tué Jimmy Hoffa, le livre de Charles Brandt sur le tueur à gages Frank Sheeran, et est rapidement inspiré par ce récit complexe et passionnant. L’acteur envoie alors une copie de l’ouvrage à son ami Martin Scorsese. Avant même d’ouvrir le livre, le cinéaste est immédiatement convaincu par l'enthousiasme de De Niro. Entre l’écriture du scénario, la mise au point de la technologie de rajeunissement, la recherche d’un financement et le casting, le tournage du film ne commencera que dix ans plus tard. Paramount ayant renoncé à le distribuer en salles en raison de son budget trop élevé, Netflix prendra le relais pour diffusion en exlusivité sur sa plate-forme.

The Irishman de Martin Scorsese, disponible le 27 novembre 2019 sur Netflix, avait enregistré plus de 17 millions de visionnage en cinq jours sur le territoire américain, selon les estimations de la société Nielsen, relayées par Variety. A titre de comparaison, le long métrage Bird Box, emmené par Sandra Bullock et diffusé fin 2018, avait totalisé 26 millions de visionnages, mais lors de ses sept premiers jours de disponibilité.

The Irishman, récit épique de 3h30 sur monde du crime organisé dans l'Amérique post-Seconde Guerre mondiale avec Robert de Niro, Al Pacino et Joe Pesci en têtes d'affiche, est sorti en exclusivité sur Netflix le 25 novembre 2019. Pour autant, son réalisateur, Martin Scorsese, déconseille aux abonnés de la plateforme de visionner le film dans de mauvaises conditions - celles qu'il considère propres aux usagers de l'application de streaming.  "Mon conseil - si jamais vous souhaitez voir l'un de mes films, ou la plupart des films d'ailleurs : par pitié, ne le regardez pas sur un téléphone. Un iPad à la la rigueur, mais un gros", déclare-t-il au critique de cinéma Peter Travers sur sa chaîne Youtube. Et lorsqu'on lui demande s'il est en mesure de faire des films destinés au visionnage sur smartphone, Scorsese botte en touche : "Je ne sais pas comment faire ça. J'aimerais pouvoir, mais je ne sais pas comment. Ca m'échappe."

Martin Scorsese a tenu à faire The Irishman sans engager des acteurs plus jeunes pour incarner Robert De Niro, Al Pacino et Joe Pesci à des âges différents. Pour ce faire, son équipe des effets spéciaux, menée par Pablo Helman, a utilisé une technique révolutionnaire qui ne nécessite aucun capteur sur le visage, comme c'est le cas notamment pour les rajeunissements des productions Marvel. C'est le studio ILM, créé par George Lucas, qui s'est occupé des effets numériques de rajeunissement. Avant cela, De Niro a fait un test avec l'équipe des effets spéciaux. Il a rejoué la scène du repas de Noël des Affranchis dans un décor reproduit, avec ses soliloques et ses expressions cultes, avant que tout cela soit modifié numériquement.

Durant la promotion de The Irishman, Martin Scorsese s'est attiré les foudres des fans de Marvel en affirmant que les films de super-héros, ce n'était pas du cinéma. "Je ne les regarde pas. J'ai essayé, vous savez. Mais ce n'est pas du cinéma. Honnêtement, ce à quoi je les rapproche le plus, aussi bien faits soient-ils, avec des acteurs donnant le meilleur d'eux-mêmes dans ces circonstances, ce sont les parcs d'attractions. Il ne s'agit pas de cinéma fait par des humains qui essayent de communiquer des émotions et des sentiments, une expérience psychologique à un autre être humain. Ces films ne prennent aucun risque. Ils sont faits pour remplir un cahier des charges et traiter un nombre limité de sujets. On parle de suites mais en réalité, ce sont tous des remakes. C'est la nature même des franchises modernes : testées auprès du public, soumises à des études de marché, contrôlées et modifiées jusqu'à ce qu'elles soient consommées." Si le cinéaste admet que ce désintérêt pour les films Marvel est une question de "goût personnel et de personnalité", il reconnaît néanmoins "le talent et le sens artistique" de ceux qui les réalisent.

D'une durée de 3h30, The Irishman est le film le plus long de Martin Scorsese. Cette durée a été jugée contraignante par certains spectateurs. Le réalisateur argumente que cela ne l'empêche en rien de gagner - et de maintenir - l'attention des abonnés Netflix. "Je ne dis pas ça parce que c'est moi qui l'a fait, mais c'était une structure narrative intéressante, et je me suis laissé captiver à chaque fois. D'une drôle de manière, je crois que j'ai réussi à voir le film dans toutes les conditions possibles. Idéalement, j'aimerais que les gens se rendent dans un cinéma, et le voient sur un grand écran du début jusqu'à la fin. Et je sais, c'est long - vous devez vous lever, aller aux toilettes, ce genre de choses, je comprends. Mais chez vous aussi, je pense que vous pouvez le regarder en une soirée, ou en un après-midi; en sachant que vous ne consulterez pas votre téléphone ou que vous n'allez pas vous lever toutes les cinq minutes, ça peut fonctionner."

Le budget total de The Irishman s’élèverait à près de 160 millions de dollars, soit environ 145 millions d’euros, un montant très largement supérieur aux projets habituellement produits par Netflix. Cette somme s'explique en partie par le coût de la technologie de rajeunissement révolutionnaire utilisée dans le film.

Lancé en août 2017, le tournage de The Irishman a duré très précisément 107 jours. Le clap de fin a été donné le 5 mars 2018 à Putnam.

Lors d'une scène de discussion entre son personnage et celui d'Al Pacino, Stephen Graham (Al Capone dans Boardwalk Empire) doit perdre ses nerfs. Pour donner plus d'authenticité à son jeu et surprendre Pacino, Graham décide, sans prévenir son partenaire, de s'énerver d'un coup et d'envoyer valser violemment la glace que Jimmy Hoffa (Pacino) est en train de manger. La réaction du comédien face à ce déchaînement brutal est donc réelle. Al Pacino dira même que "le gamin" lui a vraiment filé une peur bleue.

Avec plus de trois heures de film, le long-métrage comptabilise 309 scènes. Thelma Schoonmaker, fidèle collaboratrice de Scorsese depuis plus de 40 ans, s’est chargée du montage. Elle a déjà remporté trois Oscars du meilleur montage (1981, 2005 et 2007) pour son excellent travail sur des films du cinéaste américain : Raging Bull, Aviator et Les Infiltrés.

The Irishman a été tourné dans 117 lieux différents afin de pouvoir donner vie à l’histoire de Frank Sheeran et en particulier à son road trip aux côtés de Russell Bufalino. La recherche de ces décors a représenté un réel défi pour l’équipe du régisseur général Kip Myers.

Aux côtés des stars du long-métrage, plus de 160 acteurs ont été recrutés par Martin Scorsese et la directrice de casting Ellen Lewis pour jouer les nombreux seconds rôles et petits rôles, essentiels au film, même si certains n'ont pas de répliques.