Ce n'est un secret pour personne, Dario Argento a aujourd'hui beaucoup perdu de sa superbe et enchaîne les échecs depuis quelques années. Pourtant, Le syndrome de Stendhal se distinguait du reste par des critiques beaucoup moins virulentes, qui laissaient présager une œuvre moins ratée que les autres. Il n'en est finalement rien : le bon côtoie constamment le très mauvais et le cinéaste s'évertue à saboter toutes les bonnes idées de son film. Pourtant, la première scène démarrait fort. On voit simplement une jeune femme, Anna Manni, se rendre à la Galerie des Offices, mais le spectateur est immédiatement plongé dans un sentiment de danger imminent. Une bonne partie de l'ambiance passe par la musique chez Argento et cette séquence n'échappe pas à la règle. Bien qu'elle soit en deçà de son travail habituel, la partition d'Ennio Morricone, aidée des nombreuses voix étouffées entendues, retranscrit efficacement cet état d'inquiétude. Par ailleurs, le choix de ce musée comme décors décuple le sentiment d'enfermement de l'héroïne puisqu'elle se retrouve face à des tableaux imposants, dont certains sont même accrochés au plafond. De manière générale, tout ce qui à trait à la peinture dans l'histoire est réussi. Les scénaristes jouent beaucoup avec la dimension psychologique du syndrome de Stendhal, ce qui amène deux idées fort intéressantes. La première, c'est de faire rentrer Anna dans les tableaux, ce qui perd à la fois le personnage et le spectateur dans un monde onirique mais pas entièrement détaché du réel. La deuxième, c'est de développer l'obsession de l'héroïne pour l'art, au point qu'elle se met elle même à peindre. Elle entretient alors un rapport quasi sexuel avec la peinture (la substance) en s'en appliquant sur les mains, le corps... Mais comme je l'ai dit, Argento ruine ce qu'il y a de bien dans son film, et il décide subitement de guérir son héroïne du syndrome, ce qui enlève toute ambiguïté au personnage mais aussi à l'intrigue, qui se mue alors en un thriller poussif et mal rythmé. Déjà aux alentours d'une heure vingt, on sentait déjà qu'il était temps de conclure et cette guérison soudaine ne fait que marquer la chute du film. Tout ce qui se passe après n'est qu'une cascade d'incohérences et de ridicule. Pour commencer, les personnages, même les plus secondaires, abandonnent tout semblant de crédibilité. Le policier devient une grosse chiffe molle qui apparaît et disparaît selon le bon vouloir des scénaristes, tandis que la victime de viol, pas du tout choquée par ce qu'elle vient de vivre, compare son expérience avec la façon de coucher de son ex-mari. Asia Argento n'échappe pas non plus au n'importe quoi puisque, affublée d'une perruque blonde, elle devient une parodie de femme fatale. Parallèlement à cela, le réalisateur multiplie les scènes clownesques, comme le moment où le tueur surgit du bas du cadre comme un diablotin en dehors de sa boîte ou encore le plan avec des effets spéciaux très moches où l'on voit des pilules descendre dans un œsophage. Mais le summum, c'est quand même l'étudiant en art, qui confie sans pression à Anna qu'il s'appelle Marie et que c'est aussi un prénom masculin en France. Cela peut paraître anodin, mais les acteurs ont l'air de croire tellement fort à leur connerie que cela provoque involontairement le rire (sans compter le moment où Anna hurle le nom de son nouvel amant (ah oui parce qu'ils tombent amoureux en trois minutes aussi)). Il y a bien quelques quelques idées de mise en scène qui surnagent (la caméra qui se retourne pendant qu'elle filme un appel téléphonique par exemple), mais elle n'ont jamais le temps d'éclore, le montage (aussi catastrophique que le reste) est trop brusque et ne prend jamais le temps de montrer les chose. La seule chose que je trouve entièrement réussie est la fin, qui remonte d'un cran la tension (et croyez moi c'était pas gagné). La manière dont le twist est amené pourrait presque redorer blason de Dario Argento, mais remis dans le contexte du film il apparaît comme le dernier sursaut de génie avant l’arrêt total du cœur. Triste.