Thirst, ceci est mon sang est un projet que Park Chan-wook souhaitait réaliser depuis plusieurs années. En effet, voilà maintenant dix ans que cette histoire de vampire hante l'esprit du cinéaste coréen. Dès le tournage de Joint security area, le réalisateur avait demandé à l'acteur Song Kang-Ho de tenir un rôle dans ce projet. D'ailleurs, dans le segment qu'il a réalisé dans 3 extrêmes, Park Chan-wook mettait en scène un réalisateur en train de tourner un film de vampire. Un moyen pour lui de mettre en place certaines situations dramatiques qu'on retrouve dans Thirst.
Dans ses précédents films, comme Sympathy for Mr. Vengeance, Old Boy et Lady vengeance, le cinéaste Park Chan-wook confrontait ses personnages à des dilemmes. En s'intéressant à des criminels luttant pour leur redemption, il s'est souvent penché sur des questions existentielles. Dans Thirst, ceci est mon sang, on retrouve également le même thème cher au réalisateur, celui du rapport entre le péché et la rédemption. En effet, le personnage principal est un prêtre, symbole absolu de l'humanisme, obligé de se nourrir de sang humain pour survivre. C'est également une occasion pour le cinéaste de déconstruire le mythe du vampire.
C'est la quatrième fois que Park Chan-wook et Song Kang-Ho collaborent ensemble. Lorsque le cinéaste a proposé le rôle du vampire à l'acteur lors du tournage de Joint security area, ce dernier ne se doutait pas que le film mettrait autant de temps à se faire. Il se souvient : " Quand j'ai reçu le scénario, j'ai été surpris par la rigueur de sa construction et l'originalité de l'intrigue. Mais surtout, j'ai été heureux de constater que le projet était enfin devenu réalité ". Le comédien a suivi un entraînement physique pour endosser la carrure du vampire. Un vampire d'ailleurs surprenant, puisque faible et innocent, empreint d'une grande humanité, à mille lieues de l'archétype du vampire que l'on connaît en Occident.
Thirst, ceci est mon sang, est le premier film coréen à obtenir le financement d'un grand studio hollywoodien, Universal, ce qui lui permet de s'assurer une large distribution sur le territoire américain.
Park Chan-wook, tout au long de sa filmographie, a surpris les spectateurs en cassant l'image de ses comédiennes afin de révéler des facettes inédites de leurs talents : Kang Hye-Jeong pour Old Boy, Yeong-ae Lee pour Lady vengeance et Lim Soo-Jung pour Je suis un cyborg. Cette fois-ci, le cinéaste a choisi Kim Ok-Bin pour interpréter le personnage principal aux côtés de Song Kang-Ho. Selon le réalisateur, " le physique incroyablement juvénile et raffiné de Song Kang-Ho, comme l'énergie vitale dont elle témoigne, font d'elle une actrice au potentiel rare ". Une aubaine pour la comédienne qui estime que " c'est le type de personnage que tout acteur rêve d'interpréter un jour ". Le résultat est bluffant puisque Park Chan-wook déclare qu'elle " s'est révélée à la fois sûre d'elle et sexy dans le film (...), elle a même dépassé mes espérances ".
Park Chan-wook a fait un grand travail sur la notion d'espace dans le film. D'une manière générale, une grande majorité des scènes ayant lieu après la transformation de Sang-hyun se passent dans des endroits clos, afin de créer une atmosphère claustrophobique et oppressante. De plus, le réalisateur a souhaité démarquer l'espace de Sang-hyun de celui de Tae-ju. L'espace de Sang-hyun a été étudié de façon à ce qu'il reflète la vie strict et solitaire d'un prêtre, comme l'illustre bien le monastère et l'hôpital, avec les murs blancs et nus, le plancher en bois et les rares meubles. L'ensemble créé un décor très austère et un climat froid. A l'inverse, l'espace de Tae-ju, l'atelier de couture, est un mélange frappant d'éléments culturellement hétérogènes (Costumes traditionnels coréens, vodka, médicaments, disques de musique coréenne, des images de la sainte vierge), qui ôtent toute identité nationale à la pièce.
Le maquillage et les costumes reflètent la personnalité et l'évolution des personnages au cours du film. Au début, Sang-Hyun porte des vêtements aux couleurs atones qui évoquent un simple prêtre catholique. Mais après sa transformation, il fait de moins en moins attention à son apparence : cheveux décoiffés et tenues débraillées, signes évidents de sa métamorphose. Quant à Tae-ju, ses bouleversements émotionnels se traduisent par des changements de couleurs vestimentaires, des teintes neutres au bleu. Au départ, son maquillage est pâle, ses cheveux malcoiffés et ses tenues n'ont pas d'éclats. Mais tout change lorsqu'elle rencontre Sang-hyun, elle prend conscience de sa beauté et ose porter des tenues qui la mettent en valeur.
Park Chan-wook a lui même choisi minutieusement les musiques pour illustrer son film. Tout comme les décors et le maquillage, elles devaient symboliser l'état d'esprit des protagonistes. Ainsi, Sang-hyun écoute la Cantate BWV 82 de Bach. Les paroles de l'Aria de Bach : " parce que le le Christ a racheté nos pêchés, nous pouvons accueillir la mort comme un repos éternel " est une parfaite métaphore de ce que ressent le prêtre au cours du film. A l'opposé, Tae-ju est obligée d'écouter des chansons coréennes traditionnelles des années 40, car sa belle-mère en est fan. Des chansons qui contribuent à rendre sa vie ennuyeuse et déprimante.
Ce film était en compétition officielle au Festival de Cannes 2009.