Un étrange sentiment nous envahit lorsqu'on découvre pour la première fois ce film : un mélange de soulagement et de joie, mêlé à de l'enthousiasme et de la crainte. Car, tenons-nous le pour dit, "Le secret de la Petite Sirène" est la dernière suite exclusivement conçue pour le marché de la vidéo. Cela ne signifie pas pour autant que les personnages ne reviendront plus, ils pourront réapparaître sous forme de produits dérivés, à l'image de la fée Clochette, ou poursuivre leurs aventures sur le grand écran. C'est simplement l'ère des quatorze dernières années de médiocrité qui prend fin depuis l'apparition de la collection en 1994. Ce film se devait donc à la fois de marquer le glas de cette fumeuse collection de suites bâclées, tout en essayant d'apporter un réconfort qu'il n'y en aura plus et surtout ne pas terminer les quatorze années de suites sur une note morose. Sur ces deux points, "Le secret de la Petite Sirène" s'en sort plutôt bien. Le film a d'ailleurs beaucoup de potentiel, malheureusement beaucoup de petits détails nous confirment que nous avons bien droit à une ultime suite dans la lignée directe de ce qui avait été fait jusqu'à lui. A commencer par le personnage de Benjamin, probablement la plus grosse erreur marketing du film. Jurant inexplicablement avec tout le reste des personnages, sa présence ne se justifie à aucun moment tout au long du film. Il ne sert même pas de faire-valoir à Marina Del Rey ni de contrepoint, il n'est là que pour produire des peluches et jouets à son effigie pour les plus jeunes spectateurs (et encore !). Une autre constante transparaît dans ce film, le soin apporté aux plus anciens personnages est pour le coup remarquable à plus d'un niveau. Ariel, Sébastien, Polochon (Barboteur) et Triton sont vraiment impeccables au niveau de la gestuelle, de la personnalité et de l'animation. Particulièrement Ariel dont la palette émotionnelle de son animation et de son visage sont remarquablement bien travaillés (même si pour cela, les dessinateurs se sont inspirés d’œuvres antérieures comme "Aladdin"). Ce n'est cependant pas du tout le cas de tous les autres personnages secondaires très en dessous, et moins encore au niveau des décors (les artistes s'amusant d'ailleurs à reprendre certaines animations du premier film). Heureusement, tous les personnages secondaires sont crédibles. Le scénario du film (qui se déroule avant "La Petite Sirène") essaie de nous faire oublier complètement la précédente séquelle. En effet, à aucun moment ne sera fait une quelconque mention de l'avenir d'Ariel au-delà du premier film. Plusieurs clins d’œil ont été rajoutés ici et là pour faire un rapprochement évident avec son glorieux prédécesseur. Tous les poissons du premier film, ainsi que Eurêka (Ecoutille) font une brève apparition à plusieurs reprises. On pourrait cependant faire un seul lien avec "La Petite Sirène 2" via le talent de Triton pour confectionner de belles boîtes musicales, à l'image du pendentif qu'il offre à Mélodie lors de sa naissance, mais ce serait alors le seul cas isolé de tout le scénario. La musique est au cœur même de l'intrigue, dans une histoire par ailleurs convaincante, mais lui fait cruellement défaut. Complètement hétéroclite, elle s'éloigne très vite du style de ses prédécesseurs. Rapidement, l'ensemble des chansons se révèlent irritantes, aussi bien en VO qu'en VF, et n'apportent au final absolument rien au film, si ce n'est à le dévaloriser aux yeux du public. Pourtant, tout n'est pas à jeter dans cette suite Disney. Car contrairement à ce que le titre nous le laisse croire, l'aventure repose essentiellement sur un conflit franchement cocasse entre Sébastien et Marina Del Rey. Cette dernière devient alors une méchante inhabituelle de l'univers Disney, car elle n'est foncièrement pas mauvaise. Le succès lui monte simplement un peu vite à la tête, lorsqu'elle parvient, temporairement, à voler la vedette à Sébastien dont elle est particulièrement jalouse de sa place aux côtés de Triton. Marina Del Rey s'évertue à supporter la charge des sept filles de son roi, mais malgré tous ces efforts, elle ne récolte que quolibets et rappels à l'ordre. Son sentiment s'en trouve alors renforcé par l'effronterie d'Ariel envers son père, continuant à l'humilier encore plus vis-à-vis de Sébastien à qui tout réussit, puisqu'elle ne parvient pas à se faire obéir et respecter par Ariel. Peu à peu, son ressenti se renforce pour donner une sensibilité touchante au personnage. Elle va alors rivaliser en stratagèmes foireux, et surtout en gags burlesques jusqu'à son dénouement. Bien que regrettant amèrement l'absence de Ursula, Marina Del Rey reste une bonne surprise du film. Ursula aurait d'ailleurs parfaitement pu reprendre le rôle, et justifier ainsi son bannissement. Mais le caractère comique de Marina Del Rey s'oppose totalement avec le machiavélisme dont saura faire preuve Ursula. Et l'on ne pourra alors plus faire le moindre rapprochement entre elles. Par contre
la mort supposée tragique de la reine Athéna, la mère d’Ariel, n'a aucun impact et le roi Triton a une bien curieuse façon d’honorer la mémoire de sa femme en bannissant la musique de son royaume
. Un autre point fort du film est de découvrir pour la première fois la cité d'Atlantica véritablement peuplée. Car, à l'exception de la scène d'ouverture du premier film, nous n'avions jamais vu cette belle cité animée et peuplée de gens de toutes sortes. On découvre enfin une véritable vie communautaire chez le peuple aquatique. Cette suite Disney conclut donc une longue carrière de suites parfois épouvantables sur une note correcte. Regorgeant à la fois d'excellentes surprises et de détails exécrables, cette ultime suite Disney reste donc digne de la collection dans laquelle il est né. Ni bon, ni mauvais, il termine une période noire de l'univers Disney dans la bonne humeur