Après le succès mondial de sa première réalisation, Love Actually, Richard Curtis s'est interrogé sur son projet suivant. Il s'est alors mis à repenser à ses souvenirs d'enfance, lorsqu'il écoutait tard le soir des radios pirates qui émettaient depuis des bateaux et de plates-formes maritimes ancrées juste au-delà des eaux territoriales britanniques, à la fin des années 60. Ces stations de radio firent découvrir à un auditoire aussi nombreux qu'enthousiaste des groupes comme les Beatles, les Rolling Stones et les Kinks, et des chanteurs et musiciens tels que Jimmy Hendrix, Dusty Springfield, Janis Joplin et Aretha Franklin. Le gouvernement britannique fit de son mieux pour empêcher ces transmissions illégales qui arrivaient depuis la haute mer jusque dans les foyers de millions de Britanniques qui adoraient ce qu'ils entendaient. La passion de Richard Curtis pour la musique de cette époque était déjà une évidence dans Love Actually, où l'on pouvait entendre les chansons de Joni Mitchell, Darlene Love, Paul Anka et de John Lennon et Paul McCartney. Il lui sembla donc tout naturel que son deuxième film comme réalisateur se nourrisse de son amour pour cette musique. Il décida d'écrire une histoire se déroulant sur un bateau pirate et de l'illustrer par ses chansons préférées.
Inspiré par le film culte de Robert Altman M.A.S.H. et par le novateur American College de John Landis, Richard Curtis a souhaité retrouver l'essence de ces comédies. M.A.S.H., par sa simplicité, son absence de formalisme dans sa structure, et American College, avec ses plaisanteries et ses répliques insolentes, partageaient cet esprit de camaraderie masculine et de situations comiques qu'il imaginait sur ces bateaux évoluant au large. Il explique : "J'ai commencé à écrire quelques scènes sur des situations qui me semblaient pouvoir partir en vrille quand on se trouve sur un bateau avec plein de types à bord. On se demande tout de suite quel genre de relation ils ont avec les filles, s'il en vient de temps à autre à bord... Qu'est-ce qui se passe si l'un d'eux veut avoir une petite amie ? Comment faire pour en rencontrer une ?"
Une fois son scénario achevé, Richard Curtis l'a proposé à ses collaborateurs de longue date, Tim Bevan et Eric Fellner, de chez Working Title. Eric Fellner se souvient : "La musique, l'époque, l'histoire et tout ce qu'il y avait dans ce scénario nous intéressaient au plus haut point. Tim et moi, et tout le monde chez Working Title, avons l'immense chance de partager avec Richard une relation de travail qui dure depuis quinze ans. C'est toujours très excitant de faire un film avec lui. C'est quelqu'un de très charismatique et d'incroyablement créatif."
La productrice Hilary Bevan Jones avait elle aussi travaillé avec Richard Curtis, sur le téléfilm primé The Girl in the Café / Rencontre au sommet. Elle raconte : "J'ai lu le script et je l'ai tout de suite adoré. Il y avait énormément de choses qui rendaient cette histoire irrésistible. C'était drôle, touchant, et la musique était fantastique. Les films de Richard ont du coeur. Son travail est toujours profondément humain et chaleureux, on se sent ragaillardi en voyant ses films."
Une fois que le projet a obtenu le feu vert, Working Title a cherché les acteurs et l'équipe technique capables de faire renaître la grande époque du rock and roll des années 60. A la fois scénariste et réalisateur, Richard Curtis a rencontré un véritable défi dans le fait de porter son propre scénario à l'écran. S'il avait le luxe de pouvoir modifier continuellement son script pour mieux l'adapter aux talents des comédiens, il admet que ce projet a été aussi complexe pour lui en tant que réalisateur qu'il l'avait été en tant que scénariste. Il confie : "C'est au moment du casting que l'on découvre réellement quel genre de film on va faire. Quand je choisis mes acteurs, je cherche une texture particulière, une simplicité et une volonté de trouver l'humour dans chaque chose et de le pousser au maximum, sans pour autant tomber dans l'artificiel. Par exemple, quand j'ai cherché l'acteur qui jouerait Carl, j'ai vu 60 comédiens. Tom Sturridge a été le seul qui avait cette nonchalance, cette familiarité détendue que je cherchais."
Ce jeune Londonien de 23 ans a trouvé beaucoup de similitudes dans son travail d'acteur et dans l'évolution de son personnage à bord de Radio Rock. Il raconte : "Lorsque Carl arrive sur le bateau, il est très impressionné par ces DJ's qu'il admire. Moi, je suis arrivé sur le plateau pour travailler avec des gens comme Philip Seymour Hoffman, Bill Nighy, Rhys Ifans et Nick Frost... J'éprouvais exactement la même admiration incrédule, l'excitation, la peur et le plaisir en leur compagnie que Carl face à leurs personnages, ses héros."
Pour le rôle du Comte, un DJ exubérant et impertinent dont l'immense connaissance du rock est cependant moins grande que sa haute opinion de lui-même, les producteurs et le réalisateur cherchaient un Américain. Richard Curtis note : "Il se trouve que le plus célèbre animateur radio de l'époque était un Américain nommé Emperor Rosko. Choisir un Américain pour ce rôle était donc tout à fait indiqué, et c'était un vrai bonheur pour nous d'avoir Philip Seymour Hoffman. Nous avons eu l'immense chance d'avoir l'un des meilleurs acteurs au monde pour jouer le Comte !"
En lisant le scénario, Philip Seymour Hoffman a été impressionné par la manière dont Richard Curtis a fait du Comte un symbole de l'esprit de rébellion de l'époque. Il explique : "Mon personnage est de ces hommes qui considèrent comme leur foyer l'endroit où ils sont libres de faire ce qu'ils veulent. Pour lui, tout ce qui compte, c'est d'être DJ. Il pourrait l'être n'importe où ailleurs que sur ce bateau. Le Comte permet à des millions de personnes d'écouter les chansons qui le font vibrer. Il est celui par qui la musique passe pour atteindre les gens, et il considère le rock comme un véritable remède."
Bill Nighy, qui avait déjà travaillé avec Richard Curtis sur Love Actually, joue Quentin, le capitaine du bateau pirate Radio Rock qui se garde d'interférer dans les affaires des DJ's. Il raconte : "J'ai accepté le rôle avant même d'avoir lu le scénario. J'admire énormément Richard, j'adore ce qu'il écrit et je savais que ce serait excellent. Je ne me suis pas trompé, le scénario était fabuleux. En tant que scénariste et que réalisateur, Richard est capable de cette chose rare : rassembler des centaines, des milliers de gens dans les salles obscures et les faire rire tous en même temps."
Richard Curtis explique que lorsqu'il a écrit le film, il espérait que Bill Nighy serait disponible pour jouer Quentin. "Dans chacun de mes films, j'ai toujours en tête deux ou trois acteurs, et ici j'ai pensé à Bill. En général, je trouve surprenant de voir combien on peut écrire sans penser au casting... et réaliser ensuite qu'on a écrit le rôle pour un acteur que l'on aime déjà."
Concernant le déroulement du tournage, Richard Curtis confie : "Le film a été extraordinairement amusant à faire parce qu'il a fallu vraiment tourner sur un bateau, et dans les vraies conditions météo. Nous avons installé une sorte de village sur ce bateau, peuplé de 140 personnes, avec les cabines de maquillage, la cantine, les costumes, les acteurs et l'équipe technique... Nous partions chaque matin en mer pendant cinq semaines. Quel que soit le temps, nous tournions tout ce que nous pouvions sur ce vieux rafiot rouillé loué en Ecosse."
Pour préparer les acteurs à la vie à bord du Radio Rock, Richard Curtis les a envoyés suivre un "stage d'entraînement", durant lequel ils ont notamment appris à vivre et à répéter sur le bateau à bord duquel ils allaient tourner. Comédiens et techniciens dormaient dans de petites cabines et répétaient toute la journée. Le soir, ils mangeaient et buvaient à bord, jouaient aux fléchettes ou au ping-pong. Rhys Ifans se souvient : "Vivre ensemble nous a permis de nouer des liens. Nous avons découvert très tôt qu'il y avait sur ce film des acteurs très spéciaux, et nous sommes devenus tous très proches."