Interview : les secrets du tournage

Interview est le remake du film éponyme du réalisateur hollandais Theo van Gogh. Sorti en 2003, ce film indépendant à petit budget avait remporté un beau succès aux Pays-Bas. Petit neveu du peintre Vincent Van Gogh, Theo van Gogh était un écrivain et cinéaste controversé. A la suite de ses prises de positions violentes envers l'Islam et de son court métrage Submission : Part 1, il est assassiné le 2 novembre 2004 par un fondamentaliste religieux.

C'est lors du Festival International du Film de Toronto que Theo van Gogh et son producteur Gijs van de Westelaken ont commencé à réfléchir au remake d'Interview. Alors qu'ils venaient pour assister à la première du film, les deux hommes ont été approchés par plusieurs producteurs qui souhaitaient développer un remake en langue anglaise. Malgré l'intérêt de ces propositions, Theo van Gogh avait l'espoir de voir son rêve se réaliser : faire des films à New York. C'est pourquoi il décida de se charger lui-même de cette nouvelle version. "Interview était un choix parfait pour faire son entrée dans le cinéma américain. Le film repose essentiellement sur les dialogues et un jeu d'acteurs particulièrement riche, il est très représentatif du style dynamique et sans concession de Theo van Gogh" explique le producteur Gijs van de Westelaken. Malheureusement, le cinéaste hollandais n'eut jamais l'occasion de réaliser son rêve. Il fut assassiné quelques mois seulement après avoir commencé à travailler sur ce nouveau projet américain.

Après la mort de Theo van Gogh, Interview aurait pu être abandonné. Au lieu de cela, les porteurs du projet décidèrent de construire un nouveau concept, étendu, non plus à un seul film du cinéaste hollandais, mais à trois. Ils l'appelèrent la Trilogie Theo van Gogh. Basés eux-aussi sur la naissance d'une relation entre un homme et une femme, Blind date et 06 vinrent ainsi rejoindre Interview. "Ils illustrent parfaitement toute la sensibilité de Theo van Gogh. Tous ceux qui vivent une histoire avec quelqu'un trouveront dans ces films quelque chose qui les touchera personnellement, car ils abordent des thèmes universels. Au-delà de la question de la langue, ce sont des histoires humaines, qui ne connaissent pas de frontières" explique Gijs van de Westelaken.

Afin que la ville de New York représente un véritable personnage au sein de chacun de ces trois remakes, Bruce Weiss et Gijs van de Westelaken, les deux producteurs, décidèrent d'en confier la réalisation à des cinéastes particulièrement liés à New York. C'est ainsi que Steve Buscemi, Stanley Tucci et Bob Balaban furent choisis pour réaliser chacun un segment de cette trilogie.

Afin que le remake reflète la sensibilité d'origine d' Interview, Theo van Gogh, Gijs van de Westelaken et Bruce Weiss tenaient à ce que l'équipe originale participe à l'élaboration de la nouvelle version de Steve Buscemi. Ainsi, le directeur de la photographie, les cadreurs et la scripte se sont rendus àNew York pour le tournage.

Afin de respecter l'univers et les méthodes de Theo van Gogh, Steve Buscemi a tourné Interview en utilisant trois caméras numériques. La première servait à filmer le personnage masculin, la seconde le personnage féminin et la troisième captait en plan large les acteurs dans le décor. "Cette technique crée sur le plateau une ambiance vraiment singulière, et donne au final un style particulier au film. Ces trois caméras numériques ont permis de tourner très rapidement et de faire une grande quantité de prises. Ce qui permettait à Theo van Gogh de ne pas dépasser son budget, de ne pas épuiser ses acteurs, et de disposer d'un maximum d'images exploitables pour le montage. Cette abondance de plans permet de monter avec une intensité identique à celle de la vie réelle" explique Gijs van de Westelaken.

Pour Steve Buscemi et Sienna Miller, l'utilisation de caméras triples constituait une nouveauté. "Nous tournions 20 pages de dialogue par jour, cela allait très vite. C'était comme une pièce de théâtre" raconte l'actrice. Grâce à cette vivacité, les acteurs ont pu jouer avec spontanéité et ont aussi pu revenir sur leur jeu au fur et à mesure des prises, grâce au format numérique. Le temps de tournage s'en est vu considérablement réduit.