C'est juste avant la sortie de Fauteuils d'orchestre que Danièle Thompson a eu l'idée du Code a changé. "Il y avait cette idée qu'en arrivant à un dîner, on fait semblant d'aller bien parce qu'il y a une politesse d'apparence, explique Christopher Thompson. Le point de départ était d'imaginer ce qui se passe dans les coulisses d'une soirée entre amis. On arrive tous avec des bagages qu'on met de côté pour préserver les apparences, pour rendre le moment supportable... et on finit par y croire."
Danièle Thompson définit son style cinématographique et la tendance dans laquelle s'inscrit Le Code a changé : "Notre envie est de tenir le spectateur entre un éclat de rire et une émotion. Ce qui se rapproche plus d'une démarche italienne ou anglo-saxonne, car en France, on fait soit des films comiques, soit des tragédies. Le style, ce n'est pas quelque chose qu'on choisit mais plutôt quelque chose qu'on découvre au fur et à mesure qu'on avance dans son travail... Pendant la fabrication du film, on sait ce qu'on veut mais on ne sait pas ce qu'on fait. A ce propos, j'adore ce que dit Scorsese : "Faire un film, c'est essayer d'écrire "À la recherche du temps perdu" dans une auto tamponneuse."
Le ton de Fauteuils d'orchestre, le précédent long métrage de Danièle Thompson, se voulait proche du conte ou de la fable. Avec Le Code a changé, on se situe dans un registre plus contemporain et actuel. "On est dans un univers plus réaliste, confie la réalisatrice. On est passé de l'avenue Montaigne à cette maison au coeur de Belleville avec des personnages qui, même s'ils sont privilégiés, ont des métiers plus ordinaires. Il y a des médecins, des avocats, un cuisiniste, une prof de flamenco, un marin, une costumière... Il fallait trouver le juste milieu, d'autant plus que si on raconte ce qu'ils sont dans leurs vies professionnelles, personnelles, sentimentales, amicales, on montre aussi ce qu'ils pensent ou disent les uns des autres... Durant ce dîner, certains malaises vont remonter à la surface, des histoires naître, des relations se créer. On est dans la vie sociale - une forme de paraître, voire d'hypocrisie et de mensonge - grâce à laquelle on survit."
Pour Christopher Thompson, la difficulté principale dans l'écriture du scénario, c'était de savoir ce qui se passe avant, pendant et après ce dîner. "D'où l'idée d'éclater le récit pour essayer de donner une forme narrative originale parce que nos films ont toujours été écrits dans une unité de temps et de lieu." Et Danièle Thompson de poursuivre : "Je me souviens d'une journée où nous avons eu tous les deux un vrai refus d'obstacle. On avançait dans une trame et ça nous a paru impossible d'asseoir les personnages autour d'une table et de rester comme ça pendant une heure. On a eu envie de sortir de la maison pour suivre ces gens dans leur vie, leur univers, de les projeter dans le temps. D'où l'idée que la maîtresse de maison essaie de récupérer ses copains un an plus tard pour réunir le même groupe."
L'action du Code a changé se déroule le soir de la Fête de la musique. Danièle Thompson explique ce choix : "C'est une atmosphère en plus... C'est aussi le premier jour de l'été, le jour le plus long... Il y a un climat particulier dans les rues qui donne une couleur au film et joue un rôle dans l'évolution dramatique de certains de nos personnages."
La scène du dîner a été tournée en quatre semaines. Il fallait donc - mis à part Pierre Arditi qui arrive plus tard - que les dix acteurs soient tous réunis en même temps. "Cela a été techniquement très compliqué à régler avec les impératifs de chacun, confie Danièle Thompson. D'autant plus que cinq acteurs étaient tous les soirs au théâtre..." Et Christopher Thompson de poursuivre : "On est resté un mois dans cette maison, autour de cette table. On a beaucoup travaillé mais on a aussi énormément ri. Au-delà de nos différences, il y avait une osmose, un esprit de troupe et de solidarité entre les uns et les autres."
Danièle Thompson souhaitait faire un film avec des couleurs très gaies. "C'est le premier jour de l'été, même s'il y a des scènes de nuit, je voulais qu'on soit dans un ton coloré, explique la réalisatrice. Nous avons beaucoup travaillé avec Catherine Leterrier sur les costumes qui doivent non seulement refléter les personnalités de chacun mais aussi leur évolution à travers les deux époques. Il fallait que les personnages gardent leur style mais qu'on sente aussi qu'ils ne sont plus tout à fait les mêmes. C'est difficile de parler des décors parce que justement ils sont faits pour qu'on ne s'aperçoive pas que ce sont des... décors. Là, on est tout le temps dans le vrai et le faux. Le décor naturel et le studio se marient si bien que je défie qui que ce soit de pouvoir le déceler !"
Le Code a changé marque les retrouvailles de Danièle Thompson avec le compositeur Nicola Piovani qui avait travaillé sur son précédent film, Fauteuils d'orchestre. A son sujet, la réalisatrice ne tarit pas d'éloges : "C'est un grand musicien. Il apporte une tonalité à la fois gaie et mélancolique. Ça l'a beaucoup amusé, inspiré, que je lui demande de faire une musique italienne qui parte vers une musique... espagnole. J'avais adoré travailler avec lui sur Fauteuils d'orchestre où la partition musicale était importante mais, à cause des chansons préexistantes, moins significative que dans Le Code a changé."
Le Code a changé a remporté le Prix du Public au Festival Unifrance de Tokyo.