Tous les ans, quand le printemps revient, les gros blockbusters lourds font de même. Pour éviter l’embouteillage de l’été où deux à trois de ces mastodontes sortent simultanément, certains distributeurs préfèrent lancer leur champion quelques semaines avant où la concurrence est moins rude. Mais contrairement à une idée répandue, tous les gros films d’action bourrins américains ne se valent pas dans la médiocrité. Ils ont en commun un scénario simpliste, un manichéisme prononcé et un soucis du réalisme très relatif, mais peuvent être des vrais bons moments de détente et de plaisir, pour peu qu’ils ne soient pas réalisés n’importe comment. Au final comme les chasseurs. Il y a les bons et les mauvais.
C’est pas le fol amour entre les hommes et leurs dieux. Zeus, Hadès et compagnie en ont ras la casquette de ces ingrats qui ne les vénèrent plus assez et qui veulent prendre leur indépendance. Ils leur envoient donc des régiments de monstres abominables pour foutre le bordel sur Terre, jusqu’à que ça se calme. Pris entre deux feux, le demi-dieu Persée va à son tour se révolter contre les dieux, et on va voir ce qu’on va voir.
Louis Leterrier, réalisateur français estampillé « Luc Besson school » avait séduit avec Hulk, sa première expérience américaine. Avec une crédibilité renforcée, et sûrement un peu plus d’arrogance, il s’est retrouvé aux commandes d’un deuxième poids lourd, avec stars et gros budgets à l’appui. Malheureusement pour lui, son film fait à l'arrivée beaucoup rire. Même si l'on se doute qu’il est difficile de tout prendre au premier degré, le chef décorateur a manifestement complètement perdu les pédales, et chaque présentation de décor ou de personnage se noie dans les rires de la salle.
Il faut dire qu’entre Zeus qui ressemble à un chevalier du zodiaque avec une improbable armure argentée et les djins qui sont à la limite du droïde de la guerres des étoiles, on a du mal à s’y retrouver. Sans compter que les rois grecs portent les mêmes costumes que les romains dans Astérix et Obélix et que les décors en image de synthèse sont d’un kitch redoutable qui fait très mal aux yeux, la palme revenant à l’Olympe qui ressemble à un hamam Center Parcs. Quand l’épée de Persée se met à ressembler à un sabre laser de jedi, on se dit quand même que balancer des références à la tonne comme ça sans se soucier de son histoire, c’est proche du foutage de gueule. Le clou du spectacle est quand même l’irruption dans le champ d’un personnage qui se présente comme un grand guerrier et qui est incarné par … Mouloud, du Grand Journal. Heureusement que le ridicule ne tue pas…
Touché assez profond dans sa crédibilité, le film ne se compensera pas cette direction artistique catastrophique par autre chose : les scènes d’actions pré-vendues (le scorpion géant, le kraken) ne font pas spécialement d’étincelles, sauf peut-être la visite dans l’antre de la méduse, qui est le seul moment un peu trépidant et original. C’est bien peu pour un film qui a l’ambition de divertir, et qui est surtout d’un vide intersidéral entre chacune des « grosses scènes », le réalisateur se contenant d’étaler sa palette d’image de synthèse et de suivre des discussions bien plates, et sans aucun enjeu. Les deux très grands acteurs (Liam Neeson et Ralph Fiennes) convoqués pour l'occasion pour jouer Zeus et Hadès en font le minimum en attendant de toucher leur chèque et retourner à une activité normale. Et en terme de rythme, on en vient presque à regretter des films encore plus décérébrés mais un peu plus punchy comme Transformers ou Gi-Joe, c'est dire...
Ce qui est le plus décevant au final, c’est que l’on assiste même pas au très grand nanar qui pouvait être préssenti à la vue de cette première heure, juste à un film d’action mou du genou et qui cache sa très grande vacuité par des couches et des couches d’effets spéciaux. La saison américaine est lancée, il n’y a plus qu’à espérer qu’Iron Man 2 remontera le niveau.