Solitude indépassable, difficulté à gérer les relations humaines, les égoïsmes, les souffrances, les questions d'argent... Petits tracas et grosses angoisses, tristesse diffuse, deuil... Jaime Rosales observe quelques Madrilènes entre monotonie routinière, déchirement intime et tragédie collective (attentat meurtrier). Sur le fond, c'est assez déprimant. Sur la forme, c'est à la fois hyperréaliste et stylisé. Hyperréaliste dans la captation de tranches de vies. Des vies hélas pas toujours très palpitantes (ou alors il faut beaucoup s'intéresser à la vie domestique et ses séances de ménage, de lavage, de repassage...). Stylisé dans le concept de multiplication des points de vue et de fragmentation de l'écran (split screen). Ce dispositif cloisonné et distancié n'est pas inintéressant sur le principe, d'autant qu'il permet parfois d'asseoir l'idée d'incompréhension ou d'incommunicabilité. Mais il est lassant par son systématisme, d'autant que la plupart du temps, le morcellement des scènes, au service d'une histoire aussi minimaliste, n'apporte pas grand-chose... Qui plus est, tout cela nous est servi en longs, très longs plans-séquences, sur près de 2 h 15. Difficile, dans ces conditions de narration, de ne pas décrocher en ressentant un profond ennui, malgré la qualité de l'interprétation générale. Le film aurait vraiment gagné à être moins radical dans son concept expérimental, un peu plus dramatisé et concentré.