L'écrivain Joséphine Hart revient sur la signification du titre de son livre qui a inspiré le film, expliquant les tenants et les aboutissants du voyage secret que chacun effectue au cours de sa vie, face à un traumatisme: "La reconstruction est en réalité une question morale, au sens où les autres et leurs actions se remettent en place pour que la vie soit encore supportable (...) On dit que la vérité nous sauvera, mais c'est faux. Elle nous sauvera seulement si nous trouvons la possibilité de vivre avec. Et c'est ça qui s'appelle "reconstruction": sauver sa propre vie, comme on le peut", affirme-t-elle.
Voyage secret est adapté du roman The Reconstructionist de l'irlandaise Joséphine Hart. Le réalisateur Roberto Andò confie avoir eu le livre dans les mains à un moment très particulier de sa vie, ce qui l'a rendu particulièrement réceptif à son message: "C'est un roman très émouvant qui aborde un thème crucial: l'amour d'un frère et d'une soeur qui ont survécu à un drame, leurs différents chemins pour surmonter le traumatisme qui a marqué leur enfance (l'un par l'oubli, l'autre par la mémoire), leur inévitable séparation pour mener à bien leur vie sentimentale respective."
Davantage connu en tant que réalisateur et cinéaste de renom, Emir Kusturica incarne l'un des personnages principaux du Voyage secret. Le réalisateur revient sur le rôle clé interprété par son ami de longue date: "Au personnage de Harold (ce n'est pas un hasard s'il est incarné par mon ami Emir Kusturica), j'ai confié l'incessante et secrète mission, celle qui appartient à tout vrai artiste, de défier, au nom de l'amour, la mémoire. C'est en effet le moyen par excellence de toute forme d'art que de "reconstruire"."
Roberto Andò a choisi de déplacer le récit de l'Irlande à la Sicile pour retrouver la nostalgie de son pays, effectuant ainsi son propre voyage secret dans sa Sicile natale: "En déplaçant l'action de l'Irlande à la Sicile, j'ai pu retrouver l'atmosphère d'enchantement et de perte que l'on respire chez moi en Sicile et mon désir inassouvi et déchirant d'en retrouver toute la douceur, et non pas la terrible fureur destructrice", explique-t-il.
Pour Roberto Andò, le cinéma arrive mieux à se servir des romans quand il peut en saisir un thème sans se sentir obligé d'en illustrer l'histoire. Il raconte la façon dont il a appréhendé le tournage, en insistant sur la relation privilégiée qu'il entretient avec son co-scénariste Salvatore Marcarelli : " Avec Salvatore Marcarelli, j'ai travaillé avec une certaine liberté, grâce à une complicité liée au partage du traitement du roman. Sans ce partage, que seule la vie peut offrir, je n'aurais pas forcément entrepris ce voyage."