Le Maître est de retour ! Celui par qui tout avait commencé , il y a déjà quatre décennies, revient sur nos écrans, avec un mordant qui fait plaisir à voir, et un appétit toujours insatiable.
Il y a cinq mois à Gérardmer, à l’occasion de la quinzième édition du Festival du Film Fantastique, FANTASTIC’ARTS 2008, nous avons eu le plaisir de découvrir la dernière petite création du Maître, sur son thème de prédilection. Dès la fin des années 60, et jusqu’au milieu des années 80, les Morts-Vivants ont connu leur heure de gloire. En 1968, le « papa », George A. Romero avait frappé un grand coup dans le petit monde du Fantastique lorsqu’il avait –avec les moyens limités de l’époque- imaginé le chaos qui résulterait de la confrontation entre deux mondes, celui des vivants d’un côté, celui des morts-vivants de l’autre. Le microcosme du cinéma de genre avait accouché d’un nouveau concept, il ne lui restait plus qu’à s’assurer que celui-ci grandirait harmonieusement, entouré par des cinéastes attentionnés toujours plus imaginatifs.
Quarante années plus tard, George A. Romero en est à sa cinquième lecture du mythe du « living dead » . Le metteur en scène ne semble pourtant pas prêt à se répéter ; les amateurs du genre ne devraient pas s’en plaindre, tant il est rare de constater qu’un réalisateur conserve sur la durée la verve de ses vertes années. A tout juste 68 ans, le patriarche et sa tribu de zombies tiennent le cap comme jamais, et nous entraînent sur leurs traces, celles d’un spectacle de fin du monde.
Tout commence dans les bois, la nuit. Caméra au poing, de jeunes éudiants américains filment un court-métrage sur une momie, dans la forêt, lorsqu’ils apprennent la terrible nouvelle : un peu partout sur le territoire, des morts se réveillent, et agressent les vivants. Etudiant le Septième Art, le groupe décide de rester soudé, et de filmer les événements comme un documentaire, avec pour principale motivation de laisser une trace, un témoignage.
L’information qui leur parvient, relayée par les grands médias, est évidemment déformée. Minimisant la catastrophe au début, elle n’a guère le temps de devenir alarmiste. Et quand elle le fera, il sera trop tard. Se fiant à un réflexe bien humain, le groupe de jeunes décide de prendre la poudre d’escampette et de rejoindre leurs familles respectives. Prêts à faire un bout de chemin ensemble, ils s’entassent alors dans un van, pour traverser un pays en pleine décomposition.
Le format choisi par George A. Romero –le numérique- n’affaiblit pas son propos, bien au contraire. Bien filmée, l’histoire n’en paraît que plus réaliste, tout se déroulant en temps réel. Les effets gore, bien dosés, sont de qualité, et renforcent le décalage entre des situations dites normales et les effets d’une épidémie fulgurante. Le petit groupe est composé de personnes avec plus ou moins de relief, mais jamais confrontées à de telles circonstances. Rien ne pouvait les préparer à cela. Les horreurs auxquelles ils vont assister révèleront certaines personnalités, toutes embarquées dans la même cavale avec la même préoccupation, survivre le plus longtemps possible.
La force du film du Créateur tient à la fois au fond et à la forme. Dans Diary of the Dead, ce n’est pas tant le racisme ou la société de consommation qui se trouvent évoqués de façon explicite (cf. les précédents épisodes réalisés par George A. Romero), que le pouvoir croissant des médias, et le contrôle que ces derniers peuvent aujourd’hui exercer sur l’opinion publique, parfois de manière abusive. Cela, la petite équipe de fuyards le comprendra bien vite, c’est la raison pour laquelle elle choisira de se tourner vers cette formidable source de liberté et d’information qu’est Internet. Au détour de leur périple, le groupe apportera sa contribution à la recherche de la vérité sur la toile.
Le récit ne déroge pas à la règle : ainsi, certaines scènes constituent un passage obligé, puisque faisant partie du mythe des morts revenus de l’Au-Delà. La contamination de certains membres, bien que prévisible, n’en est pas moins exploitée avec métier. L’une ou l’autre scène se pare alors d’un éclairage inhabituel, pour devenir poignante.
Diary of the Dead est un film sombre, réaliste (dans la limite de son postulat de départ, bien évidemment), et surtout dénué d’espoir. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette orientation récente du genre, qui semble avoir trouvé cette année un écho particulier dans la Perle des Vosges.En effet, parmi la sélection de l’édition 2008 de FANTASTIC’ARTS, nombreux étaient les films à conserver leur idée de départ jusqu’aux dernières images, à savoir filmer le déclin sans appel de l’Humanité.
Une Humanité que le metteur en scène connaît bien et nous fait côtoyer tout au long du film, à travers le périple qu’entreprend la fine équipe. Les gens rencontrés seront diversement amicaux, les « vivants » pouvant se révéler à l’occasion aussi dangereux que les morts-vivants.