Cette grandiose évocation de la révolte des Boxers en Chine en 1900, et l'héroïque résistance des légations étrangères assiégées durant 55 jours, fournit un exemple de la virtuosité avec laquelle Hollywood falsifiait l'Histoire. En même temps, ça servait de prétexte, comme la plupart de ces films spectaculaires, à de gros morceaux de bravoure où la psychologie se hissait au niveau du mélodrame. C'est sans doute ce qui valut au film d'être éreinté par la critique en 1963. Pourtant, la publicité de l'époque proclamait qu'il s'agissait du plus grand décor jamais construit pour un film (en dur et en éléments préfabriqués modulables), c'est vrai, le film fut tourné en Espagne près de Madrid sur un terrain de 125 hectares où l'on reconstitua la Cité Interdite et les légations étrangères, et en faisant appel à 6500 figurants. De même que la partition de Dimitri Tiomkin se révèle très lyrique, sans oublier les costumes chinois somptueux. Cette magnificence est l'une des grandes qualités du film, et plus d'une fois on est frappé par ce style spectaculaire ; en tout cas, le film a l'allure des grandes fresques historiques déjà par son ouverture musicale (comme pour un opéra) , son générique dessiné et son carton d'entracte. Il ne faut donc pas trop vite enterrer cette superproduction qui se laisse regarder sans déplaisir ; on pourra simplement regretter le rôle d'Ava Gardner qui n'est pas suffisamment étoffé. Nicholas Ray dut quitter le plateau victime d'une crise cardiaque, si bien que le film est plus devenu un film de producteur, celui de Samuel Bronston qui venait de produire le Cid et qui s'apprêtait à tourner la Chute de l'empire romain. On fit appel pour terminer le film à Andrew Marton, vétéran aguerri des scènes d'action à grand spectacle, réalisateur de la célèbre course de chars de Ben-Hur et coordinateur des scènes américaines du Jour le plus long. Son travail donne aux séquences de foule et de bataille une puissante dimension ajoutées à celles tournées par Ray qui reflètent quelques-unes de ses préoccupations. Alors si ce film n'échappe pas toujours aux pièges inhérents à ce type de fresques grandioses, notamment par le contexte politique qui n'est que superficiellement abordé, il n'en demeure pas moins que les amateurs de grandes épopées hollywoodiennes ne seront pas déçus, et qu'il serait dommage de bouder son plaisir.