Quand "In A Lonely Place" devient "Le Violent"... Les distributeurs français n'étaient vraiment pas tributaires d'un bon niveau d'anglais. Enfin, tout cela n'est rien, finalement, puisque le titre français correspond très bien au film. Un film que je voulais d'ailleurs voir depuis des années, mais, à chaque fois, il y avait quelque chose qui me faisait manquer l'occasion. Cette fois, rien n'a perturbé mes plans et punaise que je suis content de l'avoir vu ce film. Mon attente est entièrement satisfaite. Ce film est une vraie mécanique qui tourne à plein régime du début à la fin, bon, il y a bien deux ou trois moments légèrement creux, mais ça n'entrave pas la bonne marche de l'oeuvre de Ray. Si bien que, dès le premier plan, on sait que ça va coller, il ne peut en être autrement. L'histoire est solide comme du béton armé et est passionnante jusqu'à la dernière seconde. Le final, débutant
au moment de la soirée de fiançailles chez Paul
, est superbe. Les toutes dernières secondes sont une conclusion parfaite. Cette peinture au vitriol des dessous hollywoodiens a aussi pour autre point fort la chance d'être portée par un acteur au sommet de son art : Humphrey Bogart. Dans "Le faucon maltais", "Key largo", "Le port de l'angoisse" et "Le grand sommeil", il faisait du Bogart et il faisait très bien, mais dans "Le violent", il ne fait pas du Bogart, il compose et livre sa plus belle performance d'acteur, il campe un personnage aux multiples défauts, mais qui fascine et qui impose un charisme des feux de Dieu. Lorsqu'il est submergé par ses pulsions violentes dans le final, il se fait carrément flippant. Et, c'est accentué par la mise en scène de Ray appliquant un jeu d'ombres et de lumières sur un visage rendu buriné par l'âge, les cigarettes, l'alcool et les années de travail. Face à lui, Gloria Grahame est sans doute la seule actrice qui a été capable de lui tenir réellement la dragée haute. Bogart avait pour coutume dire "vous avez devant vous l'acteur qui a tourné le plus de navets dans l'Histoire du cinéma", en admettant qu'il avait raison, bon nombre d'acteurs auraient tué père et mère pour avoir un "Violent" dans leur filmographie.