Pingpong a été présenté en 2006 au Festival de Cannes, dans le cadre de la Semaine de la Critique. Il y a décroché le prix SACD (ex aequo avec Les Amitiés maléfiques d'Emmanuel Bourdieu) ainsi que le prix de la (Toute) Jeune Critique.
Matthias Luthardt évoque le point de départ de son film : "Le soleil brille. Une femme parle à son chien. Son fils répète au piano. Le temps s'est arrêté. Dans le jardin, le chantier d'une piscine à l'abandon. C'est comme ça que tout a commencé. Très sobrement, sans fioritures. Une idylle, mais quelque chose sonnait faux. J'avais envie de m'approcher au plus près, d'étudier ce microcosme et de le décortiquer. C'est ainsi qu'est né mon premier long métrage, Pingpong. J'aime les films qui m'invitent à observer. J'aime les documentaires. Et les films qui me font oublier que ce ne sont que des fictions. J'aimerais continuer à travailler dans ce sens."
Tourné en 23 jours, Pingpong est le film de fin d'études de Matthias Luthardt, jeune cinéaste né à Leiden (Pays-Bas) en 1972. Après avoir passé son enfance entre les Pays-Bas et l'Allemagne, il obtient une maîtrise de lettres à Hambourg (son mémoire portait sur les films de Krzysztof Kieslowski). Stagiaire à Arte, il réalise deux courts métrages en 2001 et un documentaire en 2004. Cofondateur en 1999 d'une maison de production spécialisée dans la réalisation de bandes-démos pour les acteurs, il est diplômé en 2005 de l'école de cinéma de Potsdam-Babelsberg.
La musique classique -et notamment le piano- tient une grande place dans la vie de la famille que décrit Matthias Luthardt. Le cinéaste s'est inspiré de sa propre expérience : "J'ai passé ma jeunesse dans un univers habité par la musique classique. Je jouais du violoncelle et voulais en faire ma profession. C'était mon choix, personne ne me poussait à cela ; mais j'ai observé très tôt de jeunes musiciens autour de moi dont les parents étaient des artistes professionnels : ils s'isolaient avec leur instrument pour essayer d'égaler la réussite de leurs parents, et ils se soumettaient à une discipline énorme qui me fascinait et qui, en même temps, me faisait peur. Certains de ces jeunes adultes étaient tellement enfermés dans leur monde musical, sans le moindre désir de contacts sociaux, qu'ils me semblaient autistes. En pensant à eux, j'ai créé le personnage de Robert, l'une des bases essentielles du scénario de Pingping"
Le cinéaste revient sur les liens entre bourgeoisie et musique classique : "Ce jeune musicien [Robert, le fils de la famille] devait être d'une famille bourgeoise, car c'est avant tout la bourgeoisie aisée qui peut prendre en charge l'apprentissage d'un jeune instrumentiste classique. On pourrait dire que la bourgeoisie et la musique représentent le couple parfait, ou bien que la musique classique est le parfum de la bourgeoisie. C'est un parfum séduisant qui, dans le cas de la famille d'Anna, Stefan et Robert, a un goût très amer. Nous l'apprenons par le regard de Paul qui cherche une reconnaissance et de l'affection. C'est un regard direct sans préjugés. Un regard qui qui explore une famille empoisonnée par l'incapacité de communiquer. Au début, il y a de la fascination chez Paul ; à la fin il ne reste plus qu'une répulsion profonde." Notons que le chien -qui joue un rôle non négligeable dans le film- répond au nom de Schumann...
Pour la chanson du générique de fin, le cinéaste allemand a choisi le morceau d'un chanteur français : Au demeurant, de Chet, auteur compositeur interprète qui a enregistré trois albums, L'Inébranlanble en 2000, L'Amour à la française en 2002 et Hymne en 2005. Il a également écrit pour des artistes tels que Arthur H. ou Olivia Ruiz.