Preuve de l'anticonformisme esthétique et prosodique, "Capitaine Achab" est comme un voile blanc sur l'océan parfait. A l'image de ce simple plan où l'eau de la mer, régulée par des ondes infimes, prend une allure picturale, le film de Philippe Ramos étend ses milles perspectives à travers un scénario en portraits, souvent limité dans sa démarche, mais qui a le mérite de laisser planer l'imagination du cinéaste tout du long. La fluidité exceptionnelle de son réçit, aussi littéraire dans sa construction que dans ses mots, et la beauté onirique de l'image, comme peinte à l'aquarelle, donnent lieu à un film intimement lyrique, aux éclairages sourdement lumineux. Dans cette possibilité d'une vie à part (le film est très librement adapté de la légende de "Moby Dick"), Philippe Ramos laisse chanter sa vision d'un cinéma populaire intimiste, mêlant des fulgurances archi-classiques à des moments d'émotion pop, exactement comme la bande-originale de cette oeuvre atypique et émouvante. La première image du film, le sexe d'une femme que l'on devine la mère, vêtu peu à peu d'un voile blanc (encore un) qui parcourt jusqu'à son visage, est magnifique, et annonce déjà l'évocation religieuse que le réalisateur va apporter à son réçit. Le dernier plan, lui, boucle la boucle en amenant la mort du capitaine vers un ciel bleu, simple, légèrement contrarié par d'inoffensifs nuages blancs. A travers ces deux lieux qui suffisent à eux seul à donner un sens au film, Ramos capte le bourdonnement des âmes éteintes. Une histoire de famille, donc, puis une discrète parade de fantômes. "Capitaine Achab" propose alors un déroulement biblique sur la vie d'un homme qui ne cesse de prendre des directions différentes. Joue constamment de l'ellipse pour aérer pleinement le texte, pour qu'il se déploie dans la bouche de ses comédiens (tous prodigieux). Apprend à contourner les codes du genre pour faire transparaître une personnalité (revendiquée un peu de la même manière que le récent "La France", de