A travers Agua, Veronica Chen a voulu explorer toutes les métaphores des différents espaces maritimes, du fleuve à la mer: " Je dois reconnaître que le fleuve provoque chez moi un rejet instinctif. Il semble sans loi, sans signe de civilisation, il incarne la cruauté. La loi de la jungle, c'est-à-dire la loi du plus fort, du plus apte. Pourquoi l'océan ne me procure-t-il pas cette sensation ? Peut-être parce qu'il y a un horizon infini, et cela évoque toujours une promesse." confie-t-elle.
Avec le personnge de Goyo, ce nageur qui va tout faire pour reconquérir son honneur, Veronica Chen a voulu dessiner une sorte de tragédie grecque dont le plus grand combat est de savoir accepter sa défaite: " le film n'est pas différent d'une tragédie grecque. Le héros, ne se rend pas compte qu'il commet les mêmes erreurs. Son destin débouche sur la mort, mais c'est parce qu'il sauve quelqu'un avant, qu'il acquiert sa dimension héroïque."
Pour un film qui avait pour titre Agua, la réalisatrice Veronica Chen souhaitait utiliser des techniques bien préçises pour s'immerger le plus possible dans l'eau et avec ses personnages: " C'est pour ça que j'ai voulu tourner en 35 mm. En les filmant toujours sous l'eau, dans leur " intérieur ", je m'immerge avec eux. Pour cela, j'ai utilisé des travellings sous-marins. Dans le fleuve, avec l'eau trouble, on ne voit rien. L'eau est marron. J'ai choisi de montrer que les personnages sont, en un sens, aveugles. Au lieu d'aller en studio et de simuler leur vision, je les ai filmés de l'extérieur, au-dessus de l'eau. Sur la terre (qui représente pour moi la vie quotidienne), je voulais une image "propre", avec des plans fixes pour refléter le manque de mobilité, la rigidité des personnages. Le mouvement était réservé aux scènes dans l'eau, là où les personnages sont fluides."
Avec Agua, la réalisatrice Veronica Chen a voulu explorer l'espace aquatique comme lieu de ressourcement. A la manière du héros principal qui réapprend à vivre dans cet espace pour renaître, la réalisatrice éprouve un sentiment de quiétude à chaque fois qu'elle entre dans l'eau: " Si je m'immerge, même dans une baignoire, je sens que je me délivre des liens de la vie quotidienne. Son eau froide et ses vagues me régénèrent, me chargent en énergie. Chino traverse ce moment-là. Goyo l'a déjà traversé, et devra affronter de nouveau ses vieux démons. Mais tous les deux ont perdu le plaisir premier de ce qu'ils font. C'est ce qu'ils tentent de retrouver." C'est en s'immergeant à nouveau dans cette figure du liquide matriciel que les héros vont retrouver leur identité.