Le Festival de Glastonbury fut créé en 1970 par Michael Eavis. Ce jeune fermier avait alors proposé à 1500 personnes de venir dans sa vaste ferme pour assister à des concerts, pour la modique somme d'une livre. Au fil du temps, la manifestation, qui se tient chaque année autour du 20 juin, est devenue l'un des plus grands rassemblements d'amateurs de musique pop (même si les autres arts vivants, théâtre, cirque, y ont aussi leur place).
Michael Eavis a eu l'idée de ce film en 2002, à un moment où il craignait que l'avenir du festival ne soit compromis. En 2001, la manifestation avait en effet été annulée à la suite d'incidents survenus l'année précédente : alors que les 100 000 billets (capacité maximale du site) avaient été vendus, de nombreux resquilleurs étaient entrés, une situation qui présentait trop de risques pour la sécurité des festivaliers (sans parler de la question récurrente des nuisances sonores). Au printemps 2002, Eavis obtient enfin la licence lui permettant de relancer le Festival, mais préfère toutefois s'assurer que le Festival restera dans les mémoires quoi qu'il puisse se passer à l'avenir. "J'ai pensé que c'était peut-être la dernière occasion de garder une trace de ces 30 ans d'efforts, d'enthousiasme, de peur et de plaisir mélangés"" En 2006, l'année de la sortie du film en Grande-Bretagne, la manifestation ne s'est d'ailleurs pas tenue, Michael Eavis souhaitant simplement faire une pause.
Située au sud-ouest de l'Angleterre, dans le comté du Somerset, la ville de Glastonbury est profondément liée à la culture anglaise par son ancrage spirituel et historique. Le lieu est ainsi réputé pour être le berceau du christiannisme en Angleterre et a, derrière lui, une longue tradition de pèlerinages. Aujourd'hui encore, la petite ville accueille de nombreux pèlerins de différentes croyances. "Fortement lié à la culture druidique, à la légende du roi Arthur et à celle de la visite de Joseph d'Arimathie en Grande-Bretagne et par sa situation sur la principale leyline de St. Michael, le site résonne de légendes et de mythes. Ce n'est pas un hasard si, quelques jours durant, pendant le festival, l'accomplissement de la vision de Blake dans Jerusalem semble devenir possible" explique le réalisateur Julien Temple.
Les séquences ont été tournées durant les éditions 2002, 2003, 2004 et 2005 du festival, par 12 équipes. Le cinéaste a ajouté au montage des images d'archives des éditions précédentes, réalisées par des professionnels ou des amateurs. Un appel a ainsi été lancé afin que se manifestent tous ceux qui pouvaient apporter un témoignage tangible sur la festival de Glastonbury.
Grâce à toutes les images d'archives qui ont pu être réunies, l'équipe de Glastonbury a totalisé pas moins de 700 heures de pellicule. Malgré tout, des choix devaient être faits puisque le montage final ne devait pas dépasser les 135 minutes. Il fallut donc choisir des passages éloquents qui, le plus souvent, représentent de réels témoignages d'époque. Le British Film Institute a ainsi fourni des images qui avaient été tournées dans le Glastonbury des années 20, et dont les bobines avaient été retrouvées dans une benne ! Grand habitué du festival, Chris Waite a retrouvé quant à lui des images qu'ils avaient tournées en 1979 et qui montrent le musicien Steve Hillage et Peter Gabriel en train de répéter. Très rares, ces archives ont toutefois valeur de documents historiques pour une autre raison : "A l'époque, le simple fait d'utiliser une caméra était délicat parce qu'il fallait tout le temps déjouer les autorités" se souvient Chris Waite.
A ses débuts, le festival de Glastonbury donnait un sens à l'idée de communauté et de rassemblement autour des mêmes valeurs idéologiques. Manifestation incontournable des années 60, Glastonbury est aujourd'hui le dernier festival de musique à avoir survécu au temps. Si les moeurs et l'idéologie ne sont plus les mêmes, le festival a malgré tout conservé une part de ce qui faisait son identité. C'est ces évolutions et cet héritage que le documentaire de Julien Temple tente d'éclaircir : "Le miroir existe bel et bien. Le contraste entre l'esprit inchangé qui anime le coeur du festival de Glastonbury et notre façon profondément différente de vivre notre vie constitue la dynamique centrale du film. Bien entendu, le festival lui-même et ses organisateurs ont dû s'adapter pour répondre aux changements commerciaux, politiques et culturels qui se sont produits autour d'eux, mais la vision fondatrice du festival n'a jamais été trahie (...) Au fil des années, l'espace culturel a été commercialisé et transformé en marque. Glastonbury a lutté contre cela, mais a dû s'y adapter. Même les pieds dans la boue, les gens sentent qu'il faut être solidaire pour surmonter une situation difficile." Cette dualité est d'ailleurs représentée par la clôture installée depuis quelques années tout autour du site : "Le festival ne serait sans doute plus là sans elle, mais son existence même remet en question la nature du festival."
Adolescent, Julien Temple assista à la deuxième édition du festival de Glastonbury, en 1971. Mais, plus punk que hippie, le réalisateur n'y avait plus remis les pieds jusqu'à la fin des années 90. Il était alors accompagné de Joe Strummer, le chanteur des Clash décédé en 2002, auquel il a d'ailleurs consacré un documentaire, une fois le montage de Glastonbury terminé.
Avant de s'intéresser à ce grand festival rock, Julien Temple avait réalisé deux documentaires sur les Sex Pistols, La Grande escroquerie du rock'n roll et L'Obscénite et la fureur, et tourné des dizaines de clips pour Neil Young, Depeche mode, David Bowie ou encore les Rolling Stones.
Glastonbury a été présenté en 2006 au Festival de Berlin, en Séance spéciale.