Curieuse fin de film où l'oreille reconnaît Mother de Pink Floyd (The Wall, 1982). Curieuse parce qu'on ne s'y attend pas du tout (il n'y a d'ailleurs presque pas d'accompagnement musical dans ce film). Mais au fond, c'est la même infinie tristesse que dans The Wall, alors que le générique affiche "à tous ceux qui reprennent la route" (sous-entendu "après une tonne d'ennuis). C'est l'image (sonore) qu'on emporte, l'image d'une fin.
La fin d'un monde (même si l'histoire vous montrera que c'est aussi un rebond). On a l'impression d'avoir assisté à une agonie ; ici, la mort d'un homme, déjà socialement mort ; là, une construction déjà en ruine qui s'effondre. Tout végète. Chacun a l'air emprisonné dans son monde (un certain sens de l'honneur, le recours à la vengeance, le passé devenu un mur), bien qu'en toile de fond s'organise un renouveau.
Le renouveau de cette petite ville de Chixia, c'est l'approche des Jeux Olympiques de Pékin 2008. C'est surtout le grand nettoyage que ces jeux ont engendré. Et ceci aux dépens des gens et des villages. C'est bien sûr le message du film. Du moins le message politique. Et il est clair.
En tout cas, le spectateur est venu voir un personnage un peu abîmé par la vie faire copain copain avec un chien errant, abîmé lui aussi. Mais le film, c'est plutôt de longs plans qui s'apesantissent sur la destruction, le chaos, le désert (comme le désert de Gobi). Le film, ce n'est pas Croc Blanc ni Belle et Sébastien, c'est plutôt Mort à Venise. C'est donc finalement génial.
Ce n'est pas un film larmoyant, alors qu'il pourrait l'être - ce personnage qui ne parle jamais (à la différence de son ami canin qui a toujours un petit truc à japper) démontre une compassion inattendue et cache une immense douceur. C'est un film qui veut dire quelque chose de fort et qui cherche des échos partout, dans la sécheresse des paysages, dans la pauvreté des défenses humaines face à la souffrance ou l'humiliation.
A.G.